mardi 6 février 2007

Eva


Théâtre des Mathurins
36, rue des Mathurins 75008 Paris
Métro : Auber ou Havre-Caumartin
Tel : 01 42 65 90 00

Eva (Brigitte Catillon), écrivain de renom, vient de s'éteindre... Sa personnalité était tellement forte que son entourage en est désemparé. Elle était l'âme de ce microcosme, le pivot autour duquel la vie s'agençait. Pierre (Niels Arestrup), son mari et éditeur, semble réellement accablé par cette disparition. C'est grâce à Eva et à son oeuvre qu'il a acquis une certaine notoriété. Elle l'avait même pratiquement sorti du ruisseau. Leur fille (Coralie Audret), elle tellement affectée que sa petite famille passe soudain au second plan et l'on sent que ses vieux démons -drogue et alcool - ne sont pas loin de revenir la hanter. Il y a aussi un des élèves d'Eva (Benjamin Bellecour), qui n'a trouvé de refuge que dans un état proche du coma éthylique... Et puis apparaît comme par magie Camille (Linda Hardy), écrivain en herbe, protégée d'Eva et... maîtresse de Pierre, qui est convaincue de son talent et qui compte énormément sur la puissance éditoriale de son amant. Comment ce petit monde va-t-il cohabiter et trouver sa place dans le vide béant laissé par l'absence d'Eva ?
De son père Guy, Nicolas Bedos a apparemment surtout hérité de son côté amer et cynique. Cela transpirait déjà dans sa première pièce, Sortie de scène. Il n'est guère complaisant avec l'âme humaine. Ses dialogues sont vifs, habiles, incisifs.
Niels Arestrup, comme à son habitude, est impressionnant. Aussi excessif dans ses démonstrations de tendresse que dans ses emportements, il n'est pas forcèment sympathique. Mais son sincère attachement pour la défunte lui permet d'échapper à une totale noirceur... Paradoxalement, ce sont les apparitions de Brigitte Catillon (utilisation très judicieuse des flashback), qui apportent à la pièce ses bouffées d'oxygène. Il y a en elle quelque chose d'espiègle, de mutin et de malin qui nous font comprendre qu'elle n'est dupe de rien et qu'elle connaît par coeur les turpitudes de sa garde rapprochée. Elle ne les en aime peut-être que plus... Coralie Audret joue à la perfection la fragilité, le désarroi... Et la très bonne surprise, c'est la révélation de Linda Hardy dans un rôle pas évident tant elle doit en permanence jouer dans la nuance. Est-elle autant calculatrice que manipulée ? En tout cas, elle est tout à fait crédible et elle peut nourrir des espoirs légitimes quant à la suite de sa carrière de comédienne.
Avec cette brochette d'écorchés vifs, l'atmosphère de cette pièce est assez pesante. On n'en sort pas vraiment guilleret, mais on a vu du bon et du solide spectacle. Sachant que c'est toujours la deuxième oeuvre la plus délicate à réaliser, Nicolas Bedos confirme qu'il est désormais un auteur avec lequel il va falloir compter.

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