mardi 30 septembre 2008

Le diable rouge


Théâtre Montparnasse
31, rue de la Gaïté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 77 74
Métro : Gaîté / Edgar Quinet

Une pièce d'Antoine Rault
Mise en scène par Christophe Lidon
Décors de Catherine Bluwal
Costumes de Claire Belloc
Avec Claude Rich (le cardinal Mazarin), Geneviève Casile (Anne d'Autriche), Bernard Malaka (Colbert), Denis Berner (Bernouin), Adrien Melin (Louis XIV), Alexandra Ansideï (Marie Mancini).

Ma note : 8/10

L'histoire : Au sommet de son pouvoir, mais à la fin de sa vie, le cardinal Mazarin achève l'éducation du jeune roi Louis XIV sous le regard de la reine-mère Anne d'Autriche et d'un Colbert qui attend son heure. Tous ces personnages, leurs calculs et leurs rivalités, ne sont pas sans rappeler les jeux du pouvoir et ces liens étroits entre affaires publiques et vie privée dont nous sommes témoins aujourd'hui sur la scène politique. Tant il est vrai que les régimes changent mais que les motivations des hommes restent les mêmes...

Mon avis : Il ressort de cette pièce au ton très contemporain que les façons de faire n'ont vraiment pas changé sous le soleil de la politique. Bien qu'il fusse plus opportun ici de parler de ce qui se passe plutôt dans l'ombre qu'en pleine lumière. Les propos échangés entre Mazarin, la reine-mère et le ministre Colbert sont en effet d'une modernité sidérante. On a l'impression d'entendre nos dirigeants actuels et, plus particulièrement, le monarque en place. Surtout à propos de la gestion économique d'un état.
Je me suis ainsi amusé à relever deux-trois phrases réellement éloquentes : " Crois-tu que l'on pourrait gouverner un pays uniquement avec des gens honnêtes ?"... "Ce sont les coquins qui mènent le monde"... On ne fait pas de politique avec de bons sentiments"... C'est confondant de réalisme !
L'écriture du Diable rouge est un délice de raffinement, de lucidité et de cynisme. C'est intelligent sans être pesant, badin sans être futile et, surtout, agréablement caustique.
Très joueur, Claude Rich excelle dans ce genre de personnage. Depuis la salle, on voit son oeil pétiller de plaisir et de malice. D'un grand personnage de l'Etat, il possède toutes les vertus... cardinales. Il n'a pas son pareil pour faire passer - c'est selon - pertinence et impertinence, voire un certain machiavélisme. Ses joutes verbales à fleurets mouchetés avec Anne d'Autriche (Geneviève Casile absolument... impériale. Quelle prestance, quel port, quelle élégance !) ou avec Colbert (Bernard Malaka tout en retenue, et en même temps habile diplomate et ferme politicien) constituent de grands moments de théâtre. Cette pièce pleine d'esprit comporte évidemment une kyrielle de répliques savoureuses.
La note de fraîcheur et de spontanéité est apportée par les deux jouvenceaux Adrien Melin et Alexandra Ansidéï. le premier campe un Louis XIV fringant, vif, primesautier, fougueux, mais aussi déjà très mature et volontaire. Quant à la fort jolie Alexandra, elle joue une Marie Mancini plutôt fine mouche, qui refuse de se poser en victime expiatoire de la raison d'Etat. Elle réagit en femme amoureuse sans pour autant y laisser son âme et perdre sa lucidité.
Enfin, la pièce est esthétiquement très réussie. De lourdes tentures et tapisseries dans des tons de rouge orangé donnent énormément de chaleur à un décor réhaussé par la présence d'un gigantesque miroir en suspens. Quant aux costumes, ils sont tout bonnement somptueux.
Encore un grand et beau moment de théâtre. Quelle rentrée !

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