vendredi 9 octobre 2009

Audrey Lamy "Dernières avant Las Vegas"


Le Temple
18, rue du Faubourg du Temple
75011 Paris
Tel : 08 92 35 00 15
Métro : République

Spectacle coécrit par Audrey Lamy et Alex Lutz
Mis en scène par Alex Lutz

Ma note : 7,5/10

L’argument : Audrey Lamy a une certaine idée de notre société où la normalité devient soudainement absurde. Sans complexe, munie d’un redoutable sens de l’observation, elle dresse le portrait de ses copines, de ses voisins, de ses parents et rend visite à Brad Pitt, qui l’a toujours aimée secrètement… Un spectacle tout en fraîcheur et en nuances qui nous fera l’effet irrésistible d’un miroir déformant.

Mon avis : La salle est certes petite, mais elle est bourrée à craquer. Le public est en grande majorité composé de jeunes de 25 à 35 ans venus soit en couple, soit en petite bande de copains. Bien avant le lever le rideau, l’humeur est joyeuse et badine. On sent que l’on est là pour passer un bon moment avec une bonne copine… Et c’est effectivement ce qui va se passer pendant une heure vingt.
Audrey arrive en traversant la salle comme si elle venait de l’extérieur et était à la bourre. C’est donc en doudoune et coiffée d’un bonnet qu’elle monte sur scène. Tout de suite, le ton est à la confidence, elle nous prend pour témoins, elle nous narre ses petits soucis, nous fait part de ses réflexions sur les aléas de la vie de tous les jours. Et comme elle est en retard, elle se permet d’ouvrir son courrier devant nous, ce qui amène le premier sketch, une réclamation à sa banque…
L’univers d’Audrey Lamy, c’est notre quotidien. Elle raconte des (més)aventures qui peuvent arriver à tout le monde. A part qu’elle y ajoute un prodigieux don de conteuse et qu’elle a un art inénarrable de se mettre en scène. Ce qui ressort avant tout de son show, c’est que nous avons en face de nous une remarquable comédienne. Très expressive, sans cesse en mouvement, elle vit à fond toutes ses expériences. Avec sa bonne bouille, ses yeux candides et ébahis, son phrasé, elle nous fait immanquablement penser à une Marie-Anne Chazel jeune. Elle est dans ce registre, tout en finesse, tout en observation, dans un léger décalage permanent et un gros brin d’autodérision. Elle peut se permettre de sortir quelques incongruités tout en gardant un fond frais de naïveté. S’il lui arrive parfois d’être un peu crue, c’est d’abord parce qu’elle utilise uniquement un langage très actuel qui ne peut pas choquer la génération qui constitue la majeure partie de son public. Elle est totalement en phase. Comme elle le dit si bien au cours d’un sketch, on peut se montrer vulgaire, oui mais « vulgaire dans le sens positif » ! Chez elle, ça existe.

Ses sketches sont courts, efficaces. Elle les enchaîne sans temps mort, passant avec virtuosité d’un personnage à l’autre. Ce rythme lui permet de montrer un très large éventail de jeu. Elle possède en outre une très jolie voix, qu’elle module à l’envi en fonction de son personnage, prenant des tons ou des accents avec une facilité confondante.
Si, dans son premier sketch - l’appel à sa banquière (qui contient de savoureuses formulations) - elle laisse filtrer une vraie candeur, un vrai fond de gentillesse et la fragilité de quelqu’un qui n’a ni les armes ni l’autorité pour affronter les obstacles que certains dysfonctionnements dressent sur sa route pour finir par admettre qu’elle est aussi quelque peu désinvolte vis-à-vis de la gestion de son compte, dès le deuxième sketch, elle laisse apparaître une autre facette de sa personnalité : la réactivité de quelqu’un qui n’hésite pas à mettre les pieds dans le plat quand les circonstances l’exigent. Ce sketch lui permet d’ailleurs au passage d’arborer un fort joli costume de fée.
Je ne vais pas de toute façon vous raconter ses sketches par le menu. Ça ne se fait pas. Mais, si tous sont bons, il y en a quelques uns qui sont tout de même plus marquants ; souvent parce qu’il y a un fond qui donne à réfléchir. Je citerai donc, par ordre d’apparition en scène, celui qui traite très subtilement du racisme ordinaire. La formidable trouvaille qu’est le personnage de Stériline (clin d’œil à Woody Allen ?) avec accent du Midi en prime. La copine de lycée retrouvée via Facebook (une remarquable composition à la fois vocale et physique) avec cette déclaration impayable : « Deux cocas à Massy, c’est carrément le prix d’un loyer en centre Afrique ! ». Belle idée aussi que cette fameuse soirée qui faillit être déguisée et où elle se pointe en lapin ; importante cette soirée, car c’est celle où elle rencontre son mec, Cédric, qui apparaît en fil rouge pendant le spectacle. Sa parodie de film est également un grand moment au cours duquel elle joue énormément avec son corps et avec sa voix. Il y a également cette superbe composition où elle joue une mère tentant de régenter les études et les devoirs de sa fille, un sketch truffé de tics de langage. Et enfin, il y a le dernier sketch, incontestablement le plus « poëlant »… Vous comprendrez pourquoi.

Audrey Lamy… Une star de l’humour is born. Elle sait tout faire, avec une vraie légèreté. Elle pétille littéralement. Epaulée dans l’écriture et dans la mise en scène par l’excellent Alex Lutz (à qui l’on doit aussi, en plus de son très bon one-man show, la mise en scène du Comique de Pierre Palmade), elle a créé un spectacle qui ne fait pratiquement que monter en puissance au fur et à mesure qu’il se déroule. On voit bien qu’elle est à fond dans ses histoires. On sent chez elle une vraie gourmandise à jouer, un goût profond aussi pour le partage avec le public. Mais – et je tiens à bien appuyer là-dessus – c’est une formidable comédienne qui ne va sans doute pas tarder à exploser quand les réalisateurs de cinéma et de télévision se seront enfin rendu compte de son existence et de la richesse de son potentiel.
D’ailleurs, pour avoir eu la chance de découvrir en avant-première le prochain programme court que va présenter prochainement M6 à 20 h 10, Scènes de ménages, où Audrey tient l’un des six rôles récurrents, je peux vous dire qu’elle y confirme tout son talent de composition. Cette série, dans la veine spirituelle de Caméra Café et de Kaamelott, est une vraie réussite, tant dans l’écriture que dans les situations et dans le jeu de six comédiens réellement épatants.

Au fait, j’oubliais, mais est-ce vraiment utile de le rappeler, Audrey est aussi la petite sœur d’Alexandra Lamy. On ne devait pas s’ennuyer dans la famille !

1 commentaire:

Anonyme a dit…

"Deux cocas à BASTILLE" et pas à Massy, sinon le -très bon- trait d'esprit n'a aucun sens =_=