jeudi 28 février 2013

Jérémy Ferrari "Hallelujah Bordel !"


La Cigale
120, boulevard de Rochechouart
75018 Paris
Tel : 01 49 25 89 99
Métro : Anvers / Pigalle

Ecrit et interprété par Jérémy Ferrari

L’individu : Subtil, corrosif, décapant, ennemi des idées reçues et du « bien pensant », c’est sur la religion que la plume de Jérémy Ferrari a d’abord sévi.
Révélé au grand public par l’émission de Laurent Ruquier, On n’ demande qu’à en rire, sur France 2, il est devenu en quelques passages seulement le spécialiste de la provocation et de l’humour noir.
Son spectacle est entièrement basé sur des faits réels. Des faits d’actualités les plus insensés aux textes religieux de la Bible, du Coran et de la Torah, vous découvrirez tout, absolument tout ce qui vous a été caché… Jérémy étudie l’actualité religieuse et décrypte les textes sacrés pour vous !

Mon avis : Ils ne sont pas nombreux les humoristes de l’acabit de Jérémy Ferrari, qui font partie de ceux qui osent tout et ne se permettent aucune limite. Il est même pratiquement le seul à proposer un spectacle qui soit à la fois aussi subversif, aussi drôle et aussi intelligent. C’est vraiment très gonflé, mais il a le talent, des sourires et des attitudes qui font que tout passe. Ou presque…

 Le logo de l’écurie automobile du même nom est un « cheval cabré ». C’est une image qui lui convient parfaitement à Jérémy. C’est un pur-sang épris de liberté, d’indépendance. Il est pratiquement impossible de lui imposer des rênes. En continuant à jouer sur son patronyme, s’il était est un modèle de la fameuse scuderia italienne, ce serait sans conteste la Ferrari Rosso. Car pour être rosse, il est rosse. Et même féroce. Dans ce domaine, pour continuer dans la métaphore automobile, c’est également une Rolls Rosse. Et encore, « rosse » est un euphémisme tant il possède d’irrévérence sous le capot… Ce que j’ai aimé chez ce dézingueur à tout-va, c’est qu’il n’est pas dans la provocation gratuite. Tout ce qu’il énonce et dénonce dans son spectacle s’appuie sur des écrits et des faits réels. S’il se permet d’ironiser sur les trois religions monothéistes, c’est que ces trois religions ont construit leurs fondements sur une même base : l’Ancien Testament. Et Jérémy l’a lu. Il s’y est immergé, s’amusant à en souligner les incohérences et les nombreuses horreurs qui en émaillent les pages. Surtout pour ce qui concerne les femmes. Car il se délecte à jouer les misogynes. Il n’aime rien tant que de susciter l’indignation des spectatrices.

Tout ce qu’assène Notre Saigneur est donc parole d’évangile. Il brandit les ouvrages et soumet à qui veut vérifier les passages qu’il a soigneusement surlignés. Alors, comment pourrait-on lui tenir un quelconque grief ? Il est en permanence dans le factuel et dans la transparence la plus totale. N’en déplaise aux intégristes de tous poils, il n’y a absolument rien à redire.
Jérémy Ferrari est un garçon intrépide, un téméraire. Il faut oser s’attaquer ainsi aux dogmes. Revendiquer le statut d’iconoclaste tous risques n’est pas sans dangers. Les esprits bornés ne cherchent même pas à comprendre que sous le premier degré irréfutable de ses propos il y a à la fois matière à réflexion(s), et un réjouissant parti pris de rire de tout.
C’est un sale gosse, un garnement qui tire les sonnettes (d’alarme) mais qui ne s’enfuit pas une fois son forfait accompli. Au contraire. Il affronte, gratte où ça fait mal. Et, s’il le faut, il rajoute du sel sur la plaie. Il est en quelque sorte l’enfant spirituel (très spirituel même) qu’auraient pu avoir Pierre Doris et Jean Yanne s’ils avaient connus la gestation pour autrui. Son humour est à l’image de sa tenue de scène : noir, très noir. Mais chez lui, cette couleur n’est pas signe de tristesse, il a le noir guilleret. Il a ce talent de nous amuser et de nous faire rire, parfois aux éclats, avec de véritables horreurs.
  
Homme sans foi ni loi, Jérémy nous propose un spectacle très physique. Son engagement est total. Remarquable comédien, il possède un métier consommé pour jouer avec les ruptures, il excelle dans l’art de la digression et utilise habilement des silences. Evidemment, quand on va assister à son spectacle, on sait pourquoi on y va et ce que l’on va entendre et voir. C’est pourquoi il y a une réelle complicité entre son public et lui. Plus il balance et plus il nous plaît. Dans cette époque terriblement morose, des gens comme lui, qui affichent leur impudence à être politiquement incorrect, ça nous offre de joyeux moments d’oubli. C’est on ne peut plus sain… Il va parfois trop loin ? Et alors… Toute la salle se réjouit de l’y accompagner.

De toute façon, tout est dans le titre de son one man show : Hallelujah Bordel ! L’association de ces deux mots est explicite et suffisamment provocatrice pour qu’on ne soit pas surpris par son contenu. Au contraire, ça donne encore plus envie…

lundi 25 février 2013

A tort et à raison


Théâtre Rive Gauche
6, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 35 32 31
Métro : Edgar Quinet / Gaîté

Une pièce de Ronald Harwood
Traduite par Dominique Hollier
Mise en scène par Odile Roire
Décors de Stéphanie Jarre
Lumières de Jérôme Almeras
Costumes de Sylvie Pensa
Avec Jean-Pol Dubois (Wilhelm Furtwängler), Francis Lombrail (Steve Arnold), Thomas Cousseau (Helmut Rode), Odile Roire (Tamara Sachs), Guillaume Bienvenu (David Wills), Jeanne Cremer (Emmi Straube)

L’histoire : Berlin, février 1946. En zone américaine, le commandant Steve Arnold attend Wilhelm Furtwängler, le chef d’orchestre favori d’Hitler. Il est chargé de l’interroger. Il a « la question » à laquelle Furtwängler n’a jamais su répondre clairement. Malgré tous les témoignages qui se succèdent et qui innocentent le grand artiste, le commandant Arnold est bien décidé à mettre à jour sa culpabilité, guidé par une voix plus forte que les ordres qu’il reçoit…

Mon avis : Une grande partie de l’œuvre de Ronald Harwood a été consacrée à deux de ses thèmes favoris, la musique et la Seconde guerre mondiale. Très souvent d’ailleurs, il traite du Nazisme à travers l’expérience vécue par des musiciens. C’est ainsi le cas pour Le Pianiste, dont il a écrit le scénario, et pour ses deux pièces de théâtre, Collaboration, qui met en scène le compositeur Richard Strauss, et A tort et à raison, qui traite du procès en dénazification de Wilhelm Furtwängler, un des plus grands chefs d’orchestre allemands de tous les temps. Dans ces deux derniers cas, le dramaturge s’interroge sur le degré d’implication de ces deux musiciens dans le régime nazi. Etaient-ils sympathisants, étaient-ils manipulés, ou bien se sentaient-ils au-delà de toute responsabilité en raison de leur statut d’artiste reconnu et adulé.

A tort et à raison est un affrontement idéologique entre un officier américain, Steve Arnold, et le chef d’orchestre préféré d’Hitler, Wilhelm Furtwängler, deux hommes que tout oppose. Le premier est un militaire avec tout ce que cela implique de rugosité, de brutalité, de grossièreté, mais aussi de sens du devoir et d’un désir obsessionnel de vérité. Sous des apparences frustes et un comportement abrupt, Steve Arnold est un homme intelligent. Il est d’évidence parfaitement rompu à l’exercice de l’interrogatoire. Le problème, c’est qu’il s’est fait SON idée et qu’il va tenter de la rendre avérée avec un entêtement de tous les instants. Face à lui, se trouve un homme qui appartient à un monde totalement inconnu de lui et qui ne l’intéresse pas. Visiblement, la musique classique n’est pas sa tasse de thé.
Wilhelm Furtwängler est en effet un homme cultivé, racé, doux mais pas malléable. Star dans son pays, tout entier voué à son métier-passion, il est convaincu, par l’admiration qu’il suscite et les honneurs qui lui sont rendus, d’avoir acquis le statut d’intouchable. Il s’estime au-dessus de la mêlée.

L’opposition entre ces deux hommes est intense, féroce. Les attaques de Steve Arnold sont violentes, parfois basses, toutes entières destinées à obtenir un aveu : oui, j’ai adhéré au parti, oui j’avais de la sympathie pour Hitler… La défense de Wilhelm Furwängler est à l’aune de cette agressivité. Il s’indigne, s’insurge, argumente. Il se défend comme un beau diable, tentant désespérément d’expliquer sa position.
Le talent de l’auteur, c’est de nous laisser le choix du verdict. Le militaire et le musicien sont aussi convaincants l’un que l’autre. Chacun a sa vérité. A nous de nous faire la notre en notre intime conviction.

Avec un sujet aussi profond, cette pièce nous offre évidemment deux formidables numéros d’acteurs. Francis Lombrail, dans le rôle de Steve Arnold, est l’archétype du GI. Il a un physique et une gueule d’acteur américain. Il me faisait penser parfois à James Caan. Malgré son comportement abrupt, ce n’est pas un homme tout d’une pièce. On ne le découvre qu’aux trois-quarts de la pièce quand, soudain, l’armure se fendille laissant apparaître une révolte et une souffrance qui bouleversent l’opinion que l’on pouvait avoir de lui. L’homme a un cœur. Il ne pourrait pas supporter de laisser en liberté un homme qui aurait fraternisé avec un régime responsable du pire holocauste de l’histoire de l’Humanité… Mais avant d’en venir là, Francis Lombrail nous fait souvent sourire et même rire avec son langage imagé de soldat, ses réflexions à l’emporte-pièce et son premier degré.

Jean-Pol Dubois est carrément impressionnant. Il est vibrant, à vif. Il faut voir comme il réagit aux accusations. Il semble touché, mais il n’est jamais coulé. Il remonte régulièrement à la surface pour fournir des arguments et trouver des explications à son attitude. Il est tout aussi crédible que son adversaire.

Autour d’eux, voué à la portion congrue, il est difficile d’exister. Pourtant Jeanne Cremer, dans le rôle de la scripte Emmi Straube, Guillaume Bienvenu, dans celui de l’assesseur David Wills et Thomas Cousseau dans celui du second violon Helmut Rode, ont ça et là l’occasion de faire valoir un bien joli talent. Guillaume Bienvenu a un joli personnage. On sent en lui un être épris de justice, de tolérance. Il a du mérite à ne pas cacher son admiration pour cet artiste qu’est Wilhelm Furtwängler face à son supérieur hiérarchique et à rester impassible devant ses intimidations. Et il n’a pas peur de lui tenir tête... Thomas Cousseau nous offre en une scène une grande dimension émotionnelle. C’est sans doute le personnage le plus proche de nous. C’est un humble, un frustré. Il a peur pour son job et pour sa vie s’il ne rentre pas dans le moule du Nazisme. Les choix qu’ils faits sont visiblement contraints et forcés. Je pense que la majorité des gens auraient agi comme lui… Quant à Jeanne Cremer, elle apporte la seule note de féminité dans ces affrontements virils. Elle est prise ne tenaille entre la brutalité de l’officier et la sensibilité du musicien. Elle estime les deux hommes et les comprend.

Basée sur des faits historiques réels, A tort et à raison est une pièce forte en ce sens qu’elle fait appel à notre conscience et à notre discernement. Nous pouvons sans difficulté nous mettre dans la peau et de Steve Arnold et de Wilhelm Furtwängler. Comme nous pouvons tout autant nous approprier les personnages de David Wills, d’Helmut Rode et d’Emmi Straube.

vendredi 22 février 2013

Gould / Menuhin


Théâtre de L’Atelier
1, place Charles Dullin
75018 Paris
Tel : 01 46 06 49 24
Métro : Anvers

Un spectacle de Charles Berling, Christiane Cohendy et Ami Flammer
Mis en scène par Charles Berling et Christiane Cohendy
Avec Charles Berling (Glenn Gould), Ami Flammer (Yehudi Menuhin), Aurélie Nuzillard, Paul Rias, Alban Bertogliati

L’histoire : Après seulement huit années de concerts, le génial pianiste Glenn Gould ne vivait plus que la nuit, enfermé dans son studio d’enregistrement, assurant lui-même prise de son et montage de ses disques. Pour lui, la musique ne pouvait plus s’apprécier que dans l’attention active et solitaire de l’auditeur, et non plus dans une salle de concert où le jeu de scène parasite l’écoute… En parallèle, Yehudi Menuhin, violoniste solaire béni des dieux, donnait encore cent-dix concerts l’année de ses 80 ans, ferraillant sans relâche à la pointe de l’archet pour la paix entre les hommes…
Tout les oppose. A l’exception d’une admiration mutuelle, concrétisée lors d’un concert en 1966. C’est le point de départ de cette pièce musicale qui s’appuie sur les écrits de ces deux artiste hors norme, l’un déjà dans le 21è siècle (Gould), l’autre (Menuhin) héritier des interprètes du 19è…

Mon avis : Le thème de cette pièce est la confrontation entre deux gigantesques artistes que tout oppose formellement mais qui sont réunis par le génie et par une estime et un respect réciproques… Tout nous amène à la rencontre finale où les deux hommes vont enfin pouvoir échanger et partager à l’occasion d’un concert commun qui sera enregistré dans le studio de Glenn Gould.
C’est d’ailleurs un studio d’enregistrement qui sert de décor. A son centre trône un piano à queue. Au fond de la salle, autour d’une accumulation d’appareils d’enregistrement, un mur d’écrans nous permettra de suivre les images, ou de ce qui se passe en temps réel dans le studio, ou bien à projeter des images d’archives montrant les vrais Menuhin et Gould.

A travers Charles Berling, qui incarne Glenn Gould, et Ami Flammer, qui représente Yehudi Menuhin, on en apprend d’abord un peu plus sur leur jeunesse, leur cadre familial et sur ce qui les a amenés – très tôt – à la musique. Déjà se profilent deux caractères très différents. Glenn Gould apparaît plutôt rigide, introverti, limite asocial, alors que Yehudi Menuhin, de seize ans son aîné, est totalement solaire, profondément humain et amoureux de la vie. Cela est, bien sûr, agrémenté d’extraits d’interviews de Gould et d’illustrations sonores ou d’interprétations en direct de la part d’Ami Flammer. On nous prépare ainsi au duel final qui va réunir ces deux formidables instrumentistes.

Le projet est ambitieux, particulier, carrément élitiste même. Il ne s’adresse vraiment qu’à un public d’initiés, de passionnés. En revanche, en dépit du jeu – remarquable – de Berling et Flammer, pour le béotien que je suis, j’avoue m’être profondément ennuyé. Pour un profane comme moi, écouter du Schoenberg, ça tient du pensum. Alors que tout autour, je voyais des spectateurs concentrés, captivés, parfois enthousiastes. C’étaient des connaisseurs. Cette pièce est pour eux et c’est bien qu’elle existe.
Même si Gould / Menuhin ne m’a pas convenu; je tiens à souligner la prestation véritablement habitée de Charles Berling. Il est totalement « glenngouldisé » ! Il se tient comme lui, communie avec son piano comme lui, marmonne en jouant comme lui. Quant à Ami Flammer il apporte à son personnage sa bonhommie, sa luminosité, sa grande tolérance et sa profonde humanité, tout en ne se privant pas d’adresser quelques remarques très objectives à Gould.

Gigi


Théâtre Daunou
7, rue Daunou
75002 Paris
Tel : 01 42 61 69 14
Métro : Opéra / Auber

Une pièce de Colette et Anita Loos
Mise en scène par Richard Guedj
Décor de Stéphanie Jarre
Costumes de Bruno Fatalot
Musique d’Hervé Devolder
Avec Pascale Roberts (Madame Alvarez, la grand-mère), Coline D’Inca (Gigi), Axelle Abbadie (Alicia, la grand-tante), Yannick Debain (Gaston), Sophie de La Rochefoucault (Andrée, la mère), Xavier Delambre (Victor)

L’histoire : Gigi a 16 ans. Sa grand-tante Alicia, sa grand-mère et Andrée, sa mère, petite chanteuse à l’Opéra Bouffe, l’élèvent avec tous leurs soins…
Mais l’éducation prodiguée par ces trois femmes, pour être sévère n’en est que plus spéciale. La petite Gilberte est destinée à une société où les hommes peuvent donner et où les femmes savent exiger…
Ici on bannit l’amour tranquille des gens ordinaires dans le mariage. On prépare Gigi à la vie excitante des belles qu’on convoite dans les salons et qu’on admire dans les gazettes à scandales.

Mon avis : Pour être honnête, je m’attendais à une pièce un peu désuète. Elle a en effet été écrite par Colette en 1944 et adaptée au cinéma en 1951, puis au théâtre en 1951. Or, si cette comédie a inévitablement vieilli sur le fond, elle reste en revanche extrêmement moderne sur la forme, la mise en scène et le jeu des comédiens.
Déjà, c’est une grande délectation que d’entendre des dialogues d’une écriture d’excellente facture, ciselée, alerte, malicieuse. C’est donc un aspect non négligeable.
Ensuite, je me suis laissé très rapidement happer par le jeu des acteurs. Aucun des six n’est dans le même registre. Chacun a sa propre partition et la joue avec un plaisir communicatif. La complicité entre eux est en outre évidente, elle passe la rampe. Le fait que trois d’entre eux, donc la moitié de la troupe (Pascale Roberts, Yannick Debain et Coline D’Inca), jouent ensemble dans le feuilleton à succès de France 3, Plus belle la vie, y est pour beaucoup. D’ailleurs, je pense que le mieux est de s’attarder sur leur prestation.

Coline D’Inca. Avec le rôle titre, la jeune fille porte une sacrée responsabilité sur les épaules. De prestigieuses comédiennes ont incarné Gigi avant elle, Audrey Hepburn, Leslie Caron, Françoise Dorléac… Le challenge était d’autant plus délicat à relever que c’est la première fois qu’elle se produit sur scène. Et bien, impliquée dans presque toutes les scènes, elle est bluffante de présence et de naturel. Malgré son grand âge - 21 ans ! – elle se glisse aisément dans la peau d’une gamine de 16 ans. Elle en a toute la pétulance, la fraîcheur, la joie de vivre. Elle incarne l’insouciance même… Jusqu’au moment où des sentiments inconnus entrent dans sa vie et dans son cœur. La métamorphose est spectaculaire, démontrant ainsi un formidable éventail de jeu. Soudain, elle devient grave, indignée, révoltée. Elle ne supporte pas qu’on lui dicte sa conduite, qu’on choisisse son destin pour elle. Elle interprète la perte de l’innocence avec un profond réalisme. Coline D’Inca contribue largement au ton moderne impulsé par le metteur en scène. C’est vraiment une sacrée découverte !

Pascale Roberts, dans le rôle de la grand-mère, fait preuve d’un métier consommé. Elle est toute en subtilités. Amusante avec ses idées toutes faites (pour elle « mariage » est un gros mot), elle est débordante d’amour pour sa petite fille. Elle ne veut que le meilleur pour elle et cherche à lui faciliter la vie. Elle voudrait certainement être plus maligne, mais sa bonté naturelle est la plus forte. En dépit de son apologie un peu obsessionnelle de la femme entretenue, elle se révèle pleine de sagesse. Ses confrontations avec Alexia, la tante de Gigi, sont de grands moments tant les deux femmes sont différentes sur le plan comportemental. Madame Alvarez est si aimante qu’on ne peut que l’aimer en retour.

Axelle Abbadie campe avec un entrain jubilatoire cette grande cocotte qu’est tante Alexia. Elle, elle badine avec l’amour. Ses élans sont à l’aune de la fortune du parti convoité. Plus il est riche, plus elle éprouve de sentiments. Elle ne s’embarrasse jamais de périphrases. Elle va droit au but. Calculatrice, un tantinet vénale, frisant le cynisme, autoritaire, sûre d’elle et de son pouvoir de séduction, elle adore tirer les ficelles. C’est une maîtresse femme doublée d’une maîtresse professionnelle. A travers elle, on voit que Colette les connaissait bien, ces demi-mondaines… Une grande composition que nous offre là Axelle Abbadie. A l’instar de Monsieur Plus, chacune de ses apparitions apporte une valeur ajoutée à la pièce.

Yannick Debain, c’est Gaston-le-tonton. Tontaine et tonton. C’est l’archétype du séducteur. Ce dandy richissime collectionne les conquêtes. Ses liaisons, souvent tumultueuses, font le bonheur des journaux à scandales. Quand c’est à son tout d’être trompé, il affecte d’en être chagriné, éveillant ainsi la compassion de madame Alvarez. Visiblement, c’est un grand enfant gâté qui aime à se faire dorloter… Yannick Debain est parfait dans ce rôle de bellâtre somme toute sympathique. Il lui apporte son élégance, sa belle voix grave et un grand sens de l’autodérision.

Sophie de La Rochefoucault, dans le rôle d’Andrée, la mère de Gigi, complète ce quatuor de femmes avec énormément se sensibilité. Au début de la pièce, on la découvre aussi gamine que sa fille, limite irresponsable. Puis, au fur et à mesure que l’intrigue avance, on la découvre toute autre. Son seul point commun avec madame Alvarez et la tante Alexia, c’est son amour inconditionnel pour Gigi. Car, contrairement à elles, elle s’assume. Elle, elle n’a jamais rêvé de se faire entretenir ; pire même, elle TRAVAILLE ! En fait, c’est une romantique qui cultive son indépendance en rêvant au grand amour… Sophie de La Rochefoucault apporte une profondeur inattendue à ce personnage, ce qui la rend très attachante. Sa relation, basée sur la légèreté avec sa fille, laisse néanmoins filtrer une réelle mélancolie. Vis-à-vis de sa mère et de sa tante, Andrée est une incomprise.

Xavier Delambre est Victor, l’homme « à tout faire » d’Alexia. Son pantalon moulant nous fait discrètement comprendre la raison de l’attrait qu’il exerce sur sa patronne. Ses quelques apparitions, marquées à chaque fois du sceau du double sens, sont absolument savoureuses.

Gigi est parfaitement à sa place dans ce charmant écrin qu’est le théâtre Daunou (qui gagnerait toutefois à être rafraîchi pour retrouver ses ors d’antan). C’est une pièce agréable, maline, écrite par deux femmes pour les femmes, qui se déguste comme un délicieux bonbon aux saveurs d’autrefois.

jeudi 14 février 2013

Noëlle Perna : Mado prend Racine


Casino de Paris
16, rue de Clichy
75009 Paris
Tel : 08 926 98 926
Métro : Trinité
Jusqu’au 17 février
Puis en tournée
Sortie de ce spectacle en DVD le 4 mars (Sony Music)


One woman show écrit par Noëlle Perna, Richard Chambrier, Alain Sachs
Mis en scène par Alain Sachs
Lumières de Gérard Pernet

L’intention : Star autoproclamée du « chauve-binz » national, la truculente Mado vient d’avoir une nouvelle idée toute à son image : généreuse et ingénieuse ! Elle décide de transformer la morosité des clients de son célèbre bar du vieux Nice en énergie créatrice. Et les voilà embarqués dans un grand moment de théâtre classique… ou presque !

Mon avis : Troisième spectacle en dix ans de Noëlle Perna dans le rôle de Mado la Niçoise… Intégralement nouveau, Mado prend Racine, nous permet de la retrouver égale à elle-même. On sait avec qui on a rendez-vous, mais l’attente repose entièrement sur ce qu’elle va nous raconter et où elle va nous emmener. Car Noëlle est d’abord et avant tout une formidable conteuse. Dès qu’elle endosse la blouse vichy bleu ciel ou la robe de cuir rouge vif, dès qu’elle a lourdement fardé ses paupières d’un bleu pétant et qu’elle s’est couronné le chef de frisettes flamboyantes, elle devient une autre. Une autre qui n’a aucune inhibition, aucun tabou, qui porte sur la vie et la société un regard à la fois candide et ironique, qui n’hésite jamais à faire passer des messages et à prendre des positions radicales…

Mado, c’est une nature. Il faut la prendre telle qu’elle est. Ou la laisser… Car certains ne parviennent pas à goûter une forme d’humour qui lui n’appartient qu’à elle. En revanche personne n’a le droit de contester son incroyable générosité, sa folle énergie et son inventivité tout terrain.
Elle n’arrête pas de parler et de se démener pendant une heure et demie. C’est une véritable performeuse au sens américain du terme. S’exprimant autant avec son corps, ses bras et sa bouche, elle occupe la scène avec une vitalité confondante. Son spectacle est un patchwork. On y trouve de tout : des effets spéciaux (dans le sens « vêtements » du terme), des accents (africain, pied-noir, corse…), c’est un mélange habile de stand-up et de sketchs dans lesquels elle interprète différents personnages plutôt hauts en couleurs, et elle parle beaucoup d’elle est de sa famille, surtout de son mari.
Son langage est on ne peut plus imagé, elle est très moqueuse, faussement candide, pleine de bon sens, elle adore les jeux de mots, les excellents comme les éculés, et les formules approximatives. Et elle aborde des tas de thèmes divers et variés : la gastronomie, les sports d’hiver, l’écologie, le divorce, les enterrements, le naturisme… Et, pour l première fois, elle se livre à une revue de presse qui lui permets de commenter l’actualité à travers sa vision décalée et avec une impertinence de bon aloi.


Si Mado prend Racine, c’est parce qu’elle entre de plain-pied dans la tragédie grecque en proposant à ses collaborateurs, pour leur faire oublier leur quotidien et leurs soucis, de jouer une version très « salade niçoise » du Phèdre de Racine. Ses supposé partenaires étant absents ce soir-là, elle s’amuse à interpréter elle-même une partie de leur rôle. C’est le fil rouge du spectacle.
Par rapport à ses deux shows précédents, j’ai trouvé beaucoup plus coquine que de coutume. A partir du deuxième tiers du spectacle, elle joue volontiers à « Mado la grivoise ». Elle pratique l’allusion avec une gauloiserie qui s’inscrit dans la tradition française. Mais elle le fait sans jamais se montre vulgaire ou grossière. Elle préfère intelligemment se cantonner dans la suggestion (vous n’aurez jamais plus le même regard sur les quenelles). Ô Niçoise qui au mâle pense… En tout cas, vu les rires que cela déclenche, cela plaît au public.

Mado n’a aucune autre ambition que de nous distraire et de nous amuser. Et elle y réussi remarquablement. Elle sa son public, ses fidèles ; et c’est amplement mérité. Mado, c’est un sacré personnage. On ne peut que l’aimer et, surtout, saluer sa vitalité et son immense générosité.

Un pavé dans la cour


Théâtre Michel
38, rue des Mathurins
75008 Paris
Tel : 01 42 65 35 02
Métro : Havre-Caumartin / Auber

Une pièce écrite et mise en scène par Didier Caron
Décor de Claude Pierson
Lumières de Franck Willig
Avec Gaëlle Lebert (Myriam Moreau), Pascal Mottier (Cédric), Bruno Paviot (Paul Moreau), Virginie Pradal (Babette Clairval), Julien Ratel (Antoine), Samantha Rénier ou Constance Carrelet (Claudine Clairval)

L’histoire : Six locataires d’un petit immeuble organisent dans leur cour une fête pour mieux se connaître. Ils ne seront pas déçus !
Cet apéritif convivial commence au champagne, vire vite au vinaigre et s’achève au vitriol…

Mon avis : Un pavé dans la cour est la sixième pièce écrite par Didier Caron. Il y confirme un formidable talent d’auteur moderne de comédies de mœurs. Cette pièce est réellement « Un vrai bonheur ». Un vrai bonheur à jouer pour les six comédiens qui en composent l’affiche, et un vrai bonheur pour le public qui prend un énorme plaisir à les voir s’affronter dans un règlement de compte d’une heure et demie.

En effet, le pavé en question est un pavé sauce au poivre particulièrement relevé. La force de Didier Caron est de s’appuyer sur l’humour et une apparente légèreté pour aborder des thèmes bien plus profonds. Son cheval de bataille, c’est la communication, ou plutôt son absence. Ici, tout repose sur le relationnel. Un pavé dans la cour traite des relations mère-fille, mari-femme, frère-frère. C'est-à-dire que chacun est concerné. D’ailleurs, si on ne cesse de rire grâce au festival de répliques cinglantes et assassines, tout de suite après on réalise que l’on rit de nous-mêmes. Nous sommes tous concernés à un moment ou à un autre. Et ça nous donne à réfléchir sur notre façon de nous comporter avec nos proches. Le statut de « voisin » ne sert en fait que de révélateur puis d’accélérateur. Ce n’est pas anodin si, à un moment, le personnage de Myriam parle de « jeu de massacre ». Nous sommes en effet confrontés tout au long de la pièce à des affrontements directs et croisés.

Ça commence par une sorte de round d’observation. On s’envoie des petites piques, des allusions perfides, des reproches mesquins… Cela nous donne le temps de bien saisir les profils psychologiques de chacun. Chaque mentalité est remarquablement dessinée. Il faut dire que, dès le début, Paul Moreau, l’instigateur de cet apéritif entre voisins, met la barre très haut. Cet individu se révèle être tout à la fois – accrochez-vous, car c’est un redoutable cumulard – psychorigide, ronchon, radin, réac, raciste, égoïste, misogyne. En revanche, il n’est absolument pas faux-cul. Il se complaît au contraire à dire tout haut ce qu’il pense, surtout quand c’est du mal. Alors, autour de lui, chacun à sa façon va tenter de se mettre au diapason… Après quelques touches à fleuret moucheté, on prend la mouche, et les assauts deviennent plus directs, plus appuyés. Malheur à celui qui n’assure pas sa garde.

Si on y rit pratiquement en continu, Un pavé dans la cour est une très bonne comédie car elle n’est pas QUE drôle. Bien des choses y sont clairement dites. La salle réagit sans cesse en fonction de ses inimitiés ou de son empathie pour l’un ou l’autre. L’hypocrisie se le dispute à la franchise, les cachotteries et les petits secrets longtemps tenus gardés s’effondrent soudain sous la poussée de la Vérité et des révélations qu’elle suscite. Personne n’en sortira indemne et chacun en sera transformé… Cela génère de jolies petites plages d’émotion et on a parfois les yeux qui picotent agréablement.

Il faut saluer la perfection de la distribution. Tous les comédiens sans exception ont l’air de vrais gens. Et chacun d’eux doit se régaler à interpréter un personnage aussi bien dessiné. Ils sont tous impeccables. Sans vouloir faire ombrage à leurs partenaires, je donnerai toutefois une petite mention particulière à Bruno Paviot (Paul Moreau) pour son irrésistible talent à se faire unanimement détester, à Julien Ratel (Antoine) pour ses attendrissantes fragilité et gaucherie, et à Constance Carrelet qui nous offre une prestation émouvante toute en nuances et en révolte contenue. Mais ils sont vraiment excellents tous les six.
Et bravo enfin à Didier Caron pour l’impressionnante qualité de son écriture. Quel dialoguiste !

vendredi 8 février 2013

Mustapha El Atrassi


Théâtre Trévise
14, rue de Trévise
75009 Paris
Tel : 01 45 23 35 45
Métro : Grands Boulevards

Textes de Mustapha El Atrassi, Florian Gazan, Morgan Spillemaecker
Mise en scène de Morgan Spillemaecker

Le propos : Après avoir foulé les scènes américaines, Mustapha El Atrassi nous revient plus fort que jamais, des idées plein la tête. C’est seul en scène que ce jeune homme se transcende dans cet art de faire rire. L’œil vif et pétillant, il nous emmène, et parfois même nous malmène, dans un univers où il sait dénoncer les travers qui nous pourrissent la vie, toutes ces choses qui nous angoissent et nous gênent… C’est en véritable comédien que Mustapha, maître de l’improvisation, joue et se joue de lui-même.

Mon avis : C’est évident, Mustapha El Atrassi aime la scène. Il a besoin de ce contact direct avec le public. Dans son précédent one man show, déjà brillant au niveau de la tchatche, il s’était montré à la fois un peu gêné aux entournures et chien fou. Trois ans après sont passage à l’Olympia, c’est un tout autre « Mouss » qui se présente sur la scène su Trévise. Bien que cela ne se voie pas physiquement, il a pris des épaules, de l’aisance, de la confiance. Ce qui se traduit autant dans sa façon de bouger que dans le contenu de son spectacle.

Son entrée en scène est d’une sobriété exemplaire. Pas d’effets superfétatoires genre « attention, je me suis produit aux Etats-Unis et à Montréal au côté des plus grandes stars américaines du stand-up, vous allez voir ce que vous allez voir !... » Pas du tout. On le retrouve tel qu’en lui-même, avec seulement beaucoup plus d’assurance.

Avant même de parler, avec son seul sourire enjôleur et son œil malicieux, on sent qu’il a le public dans sa poche. Son capital sympathie est indéniable. Et ce fameux sourire, si naturel et encore enfantin va lui permettre de faire passer certaines horreurs, certaines audaces et, surtout, d’authentiques messages. Car il y a deux niveaux de lecture dans son spectacle. Il y a de la pure gaudriole, de la méchante vanne un peu gratuite (il adore chambrer) et une vraie jubilation à provoquer et à choquer. Ce qui laisse parfois des trash. Mais derrière ce qui est sa marque de fabrique, cette impertinence à laquelle il nous a habitué en radio et à la télévision, il y a une vraie réflexion. Il a des indignations qui donnent à méditer. Mais j’y reviendrai…

Mustapha est l’archétype du stand-upper. Il parle, il parle, il parle. Il parle de sa vie, de son enfance, des métiers qu’il n’aurait pas pu faire, des anomalies et des dysfonctionnements de notre société, de sa passion pour les animaux, il se moque de son physique, exprime son incompréhension à propos de certains comportements féminins, évoque fréquemment les réseaux sociaux… Il s’amuse, se révolte, dénonce, rit de lui-même. Il possède en plus une remarquable aptitude à rebondir sur les réactions du public. Il adore reprendre de volée une réflexion émise à voix haute et la renvoyer magistralement à son expéditeur.

Il utilise toutes les richesses de la langue française et étaye son discours d’images souvent très originales. Pour vous donner un seul exemple, ma saillie préférée a été : « La dernière fois qu’elle a pris une douche, c’est quand sa mère a perdu les eaux »… Chansonnier moderne, c’est également un adepte du name dropping. Le public adore quand il stigmatise tel ou telle célébrité.

Enfin, pour approfondir ce deuxième niveau de lecture que j’ai évoqué plus haut Mustapha El Atrassi ne s’autorise aucun tabou. Il s’appuie sur son goût avoué pour la pratique de l’onanisme et son appétence pour les sites porno pour développer le problème que les « Rebeus » ont avec le sexe. Je vois de nombreux one man shows, mais c’est la première fois que je vois un humoriste d’origine maghrébine pratiquer ainsi l’anti-communautarisme, le revendiquer et l’argumenter aussi intelligemment. Les choses sont dites avec le sourire, mais elles sont dites. Et si elles trouvent écho chez quelques uns, c’est on ne peut plus bénéfique et positif…

Mustapha parle donc sans discontinuer pendant une heure et demie. C’est déjà une performance en soi. Evidemment, il ne peut pas être au top de l’ingéniosité pendant 90 minutes. Dans le premier tiers de son spectacle, il a abordé des sujets qui ne m’ont pas spécialement amusé (les babas-cools, les hommes aux cheveux longs, son chat). Mais c’est à peu près tout car, dans les deux autres tiers, il franchit un palier et, tel un coureur de fond, il trouve son plein régime et finit de plus en plus fort.
Et, lorsqu’il salue à la fin de sa prestation, c’est le public qui, en un mouvement spontané de remerciement et de partage, est « stand-up » devant lui…

jeudi 7 février 2013

3 lits pour 8


Théâtre Saint-Georges
51, rue Saint-Georges
75009 Paris
Tel : 01 48 78 63 47
Métro : Saint-Georges

Une pièce d’Alan Ayckbourn
Adaptée par Victor Lanoux
Mise en scène par Jean-Luc Moreau
Décor de Caroline Mexme
Lumières de Jacques Rouveyrollis
Costumes de Mathilde Penin
Avec Bernard Alane (Alain), Jean-Christophe Barc (Frédo), Annick Blancheteau (Mireille), Juliette Meyniac (Magali), Marie Montoya (Natacha), Pierre-Olivier Mornas (Antoine), Mathilde Penin (Chloé), Dimitri Rataud (Maxence)

Le thème : Comment Antoine et Natacha peuvent-ils mettre en péril l’équilibre de trois couples au cours de la même soirée ?
Prévue pour être festive, elle va vite devenir une catastrophe pour tous, jeunes et moins jeunes…

Mon avis : Magali et Frédo ont organisé la pendaison de crémaillère dans leur petit appartement encore en travaux. Ils ont invité leurs plus proches amis, y compris les problématiques Natacha et Antoine, un couple en pleine crise, et Chloé, l’ex d’Antoine… Magali et Frédo sont heureux. Ces tourtereaux vivent leur idylle comme deux collégiens farceurs et pleins de fantaisie. Ce sont de vrais bisounours. Hélas cette belle harmonie va être fortement menacée avec l’arrivée de nos deux énergumènes…

Voici, en gros, le nœud de l’histoire. L’idée de départ est excellente, propice à des tas de rebondissements et à de nombreuses possibilités de jeu pour les huit personnages concernés. En fait, tout est dans le titre de la pièce : « 3 lits pour 8 ». Trois couples sont donc dans leur nid légitime et respectif, et Natacha et Antoine vont être les coucous qui vont effrontément taper l’incruste.
L’originalité de la mise en scène, c’est que le plateau est partagé en trois. Nous assistons ainsi en simultané à ce qui se passe dans trois chambres : côté jardin celle de Mireille et Alain, les parents d’Antoine, au milieu celle de Magali et Frédo, côté cour celle de Chloé et Maxence… cette disposition, en supprimant tout changement de décor, permet à la fois de donner du rythme et d’assister à ce qui se passe dans les autres chambres par rapport à celle où se place l’action. Ça, c’est un (très) bon point.

Maintenant, il reste le déroulé de l’histoire… Les comédiens, absolument irréprochables, ne sont pas responsables de la faiblesse de la pièce. Alan Ayckbourn est un auteur de comédies à succès qui ont fait leurs preuves sur toutes les scènes du monde. Or, celle-ci, qui date de 1975, est sans doute celle qui a le plus mal vieilli. Elle colporte en effet un humour gentiment désuet. Nous sommes aujourd’hui habitués (et demandeurs) de choses plus mordantes, plus incisives. En dépit ça et là de quelques saillies amusantes, je dois avouer que mon premier vrai sourire n’est intervenu qu’après plus d’une heure de jeu. Et je n’ai vraiment bien ri qu’à la toute fin quand les parents d’Antoine téléphonent chez les amis de leur fils au petit matin… Autour de moi, les rires étaient plutôt sporadiques. Seules quatre ou cinq personnes riaient presque systématiquement.

Je ne vais néanmoins pas chambrer et jouer les mauvais coucheurs à propose de 3 lits pour 8. En matière d’humour, les goûts sont divers et variés et, surtout, très personnels. J’ai trouvé cette pièce gentillette. Sans plus. Certains partis pris de mise en scène m’ont même agacé. Je n’ai pas aimé le trop grand nombre de décibels des cris de douleur de Maxence cloué au lit par un lumbago. Et, pire encore, je n’ai pas apprécié le sur-jeu que l’on a imposé à Marie Montoya, qui tient le rôle de Natacha. Cette jeune femme talentueuse, qui possède naturellement une formidable présence comique, n’a pas besoin de cette gestuelle grotesque et de prendre des poses de tragédienne hystérique alors qu’avec de simples mimiques elle est capable de nous faire exploser de rire…

Le couple qui m’a le plus amusé et touché est celui des séniors, formé par Bernard Alane et Annick Blancheteau. Ils sont attendrissants. Juliette Meyniac est adorable, craquante de gentillesse et de bonne volonté. Jean-Christophe Barc est un bon nounours qui ne sait pas quoi faire pour protéger sa vie de couple. Mathilde Penin est fraîche et dynamique, très moderne. Quant à Pierre-Olivier Mornas, dans le rôle d’Antoine, c’est une sorte de Gaston Lagaffe déprimé, un oiseau mazouté complètement à l’ouest dont on se demande tout au long de la pièce pourquoi il fait tourner ainsi la tête des filles.


Pour finir, je pense que cette comédie saura toutefois trouver son public et qu’elle va marcher honorablement.

mardi 5 février 2013

Arnaud Ducret


En tournée

One man show d’Arnaud Ducret
Mis en scène par Karim Adda

Mea culpa : Je n’avais pas eu le temps de parler du nouveau one man show d’Arnaud Ducret lorsque je l’ai découvert en décembre dernier et je me le reprochais tous les jours.
Heureusement, l’énergumène est actuellement en tournée et il est donc possible de le voir sur scène ici et là en France. Alors, surtout, si d’aventure il se produit près de chez vous, courez-y. Vous allez passer un moment inénarrable de drôlerie.

Arnaud Ducret cultive le paradoxe d’être grand et beau et de s’en moquer éperdument. Pas un seul instant il ne joue de son charme pourtant insupportable pour les spectateurs masculins. En revanche, les dames et les demoiselles doivent fantasmer grave sur un tel échantillon de mâle. C’est un de ses atouts, mais il ne l’utilise pas. Il adore au contraire interpréter des personnages ridicules, un peu bas de plafond, affligé parfois d’un pittoresque accent bas-Normand. Il se complaît même à camper les crétins absolus. Il n’a peur de rien, ne recule devant aucune extravagance. Il ose tout.

Arnaud Ducret est un artiste complet. Il fait ce qu’il veut de son corps, danse à ravir, chante remarquablement bien, joue admirablement la comédie et c’est un excellent mime ; il possède même des dons de bruiteur… Beau et bon à la fois… Quand je vous dis qu’il est énervant ! Tous les individus qu’il interprète tout au long de son spectacle sont plus vrais que nature. Il est précis, possède le geste et le ton justes. Ses sketchs sont en outre intelligents et fort bien écrits.
Il interprète une bonne dizaine de personnages, dont certains, pour notre plus grand plaisir, sont récurrents, sans aucun temps mort, sans aucune baisse de régime. Au contraire. Véritable bête de scène, d’une forme physique affûtée, il fait preuve d’une incroyable énergie. Il doit finir complètement vanné et en ayant perdu quelques centaines de grammes.

C’est la deuxième fois que je le vois sur scène (je l’avais découvert au Petit Palais des Glaces) et je le tiens pour un de nos tout meilleurs comiques actuels. Charisme et talent sont les termes qui le définissent le mieux.
Allez le voir, je vous assure que vous passerez avec lui un des moments les plus réjouissants auxquels il soit donné d’assister actuellement.

La véritable histoire de Maria Callas


Théâtre Déjazet
41, boulevard du Temple
75003 Paris
Tel : 01 48 87 52 55
Métro : République

Une pièce de Jean-Yves Rogale
Mise en scène par Raymond Acquaviva
Scénographie de Jean-Michel Adam
Lumières de Jacques Rouveyrollis
Avec Andréa Ferréol (la mère de Callas), Pierre Santini (Onassis), Sophie Carrier (Callas adulte), Lola Dewaere (Callas jeune), Raymond Acquaviva (Meneghini), Cécile Pallas (Jackie Kennedy)

L’histoire : De son adolescente grassouillette à la diva qui ressemble à une gravure de mode, Maria Callas prouve que si le ciel l’a voulue grosse, elle a même vaincu le ciel. Mais après cette métamorphose, celui-ci ne sera plus jamais clément pour elle.
L’auteur nous met en présence de « monstres » de la mythologie moderne : il y a Evangelia, la mère abusive ; Battista Meneghini, son mari, qui devient son mentor, son imprésario, mais oubliera de lui faire l’enfant qu’elle désire tant ; Aristote Onassis, dont elle tombe follement amoureuse…

Mon avis : On ne reviendra pas sur le formidable talent vocal de Maria Callas qui a fait d’elle la cantatrice la plus célèbre de tous les temps… Ici, le parti pris de l’auteur, Jean-Yves Rogale, est d’évoquer sa vie, une vie privée ô combien romanesque, en une dizaine de séquences ou tableaux.
Chacune de ces scènes nous montre Maria Callas, soit dans son intimité, soit à un tournant de son existence. Il était en effet essentiel de commencer la pièce par son adolescence et sa relation conflictuelle avec sa mère. Car c’est à cette époque qu’elle a à la fois développé ses complexes sur son poids et affirmé son caractère. Un tempérament tempétueux qui ne va plus jamais la quitter quelles que soient les circonstances, professionnelles ou sentimentales.

Le décor est volontairement réduit à sa plus simple expression. Il n’a aucune importance car tout est basé sur l’aspect relationnel entre les différents protagonistes… Jolie idée de mise en scène, les déplacements des quelques éléments de décor sont effectués par une danseuse au son de la voix de la Callas qui va ainsi nous égrener ses plus grands succès. C’est bien de l’entendre chanter, même brièvement. Ça nous rappelle combien elle a été exceptionnelle… L’autre bonne idée est d’avoir dressé au fond de la scène un immense miroir. Astuce qui a pour avantage de donner de la profondeur et de doubler les effets.

La pièce se déroulant dans l’ordre chronologique, on assiste aux principales étapes de sa vie amoureuse, une vie amoureuse qui a eu une incidence directe sur son comportement dans sa vie artistique… Ainsi, dès le deuxième tableau, Callas, âgée de 24 ans, déjà auréolée par le succès, décide contre l’avis de sa mère d’épouser un industriel italien de 30 ans son aîné, Baptista Meneghini. En devenant son mentor et son imprésario, il va faire d’elle une diva absolue.
Cinq tableaux et dix ans plus tard, elle rencontre le richissime armateur grec Aristote Onassis, devient sa maîtresse et divorce de Meneghini…

Tout au long de la pièce nous sommes les témoins de disputes incessantes, de relations tempétueuses et passionnelles. Effectivement, nous sommes en présence de Latins. Ça gesticule et ça parle fort. Et puis il y a aussi en permanence la présence subliminale de la mythologie. Ce sont, pour comprendre la psychologie des protagonistes, des éléments prépondérants.

Pour jouer des scènes la plupart du temps aussi exacerbées, il faut des acteurs de tempérament. La distribution est sans faille. Sans jeu de mot, ils sont tous au diapason. Je donnerai toutefois une mention particulière aux compositions réalisées par Raymond Acquaviva dans le rôle de Meneghini (il s’est fait un look minimaliste. On dirait Aznavour !) et par Pierre Santini dans celui d’Onassis.

En résumé, j’ai apprécié les intermèdes chantés et dansés (remarquable bande son), trouvé très judicieuse l’idée de donner la parole à l’ancienne Callas et de la mettre en opposition avec celle qu’elle est devenue et, bien sûr, le jeu des comédiens.
Seul reproche, j’ai déploré deux ou trois longueurs, comme le quatrième tableau (monologue de Callas) et, surtout, à la fin, quand la pièce, se métamorphosant théâtralement en tragédie grecque, se fige et se fait un peu bavarde. Je suis certain qu’avec un quart d’heure de moins, La Véritable histoire de Maria Callas serait encore plus efficace et convaincante. Mais ce n’est pas grand-chose eu égard aux excellents moments de comédie qu’elle nous fait vivre.

lundi 4 février 2013

Ma première fois



Splendid
48, rue du Faubourg Saint-Martin
75010 Paris
Tel : 01 42 08 21 93
Métro : Strasbourg Saint-Denis


Jusqu’au 30 mars 2013

Une pièce de Ken Davenport
Traduite par Marie-Astrid Périmony
Adaptée par Clément Michel
Mise en scène par Gabriel Olivarès
Avec Séverine Ferrer, Belen Lorenzo, David Macquart, David Tournay




Le sujet : Se basant sur plus de 40.000 témoignages recueillis sur un blog intitulé « myfirsttime.com », invitant les internautes à raconter anonymement leur première fois, Ken Davenport crée la pièce My First Time qui est un florilège, un véritable feu d’artifice des témoignages les plus fous, les plus surprenants, les plus touchants, les plus hors normes, drôles, grotesques, émouvants, hétéros, homos, mais toujours authentiques.

Mon avis : Et bien tout est dit dans cette présentation. Difficile d’en rajouter au niveau des adjectifs. « Florilège, Feu d’artifice, surprenant, touchant, drôle… », c’est tout à fait vrai… le sujet de la pièce, facile cette fois de le déflorer. Il porte sur ce moment très intime que tout le monde, ou presque, a vécu une fois, et une seule, dans sa vie : le dépucelage. Tout dans les propos nous y mène (jeu de mot).

Le premier constat que l’on ressent quand la pièce est terminée, c’est que la mise en scène et les effets mis en œuvre sont réellement réussis. Pourtant, il n’y a pas grand-chose : quatre tabourets de bar que l’on peut utiliser à d’autres fins et quatre grands panneaux de tissu blanc qui servent d’écran pour des décors, des projections, voire des ombres chinoises, ou qui pivotent pour donner lieu à un jeu de portes. Quelle efficacité ! Rien qu’avec les nombreuses trouvailles qui ponctuent cette scénographie ô combien inventive, le pari est gagné.
Et quand on y ajoute la remarquable performance des comédiens, on se dit que Ma première fois mérite amplement de drainer un large public. En effet, tout le monde est concerné par ce thème et, pourtant, c’est un sujet que l’on aborde rarement entre soi…


La pièce est toute construite en arythmie. Ça commence par une salve de petites phrases, de réflexions, de confidences, des brèves quoi. Cet exercice choral donne un échange très vif. Après quoi, on assiste à de plus ou moins longues saynètes interprétées à deux, à trois ou à quatre, permettant ainsi tout un éventail de situations le plus souvent très drôles… Il y a toutefois aussi une séquence pleine de tendresse et d’émotion qui nous étreint littéralement le cœur tant elle déborde d’amour… Il y a également de la musique, accompagnant du chant ou du slam (signée Pierre Billon). Et, parmi ce tourbillon drolatique, il y a un tableau qui m’a complètement bluffé et enchanté, celui de la post synchronisation. Vous comprendrez quand vous le verrez.

Sans jouer les pères-la-pudeur - ce que je ne suis pas -, certains tableaux ou certains dialogues sont vraiment gonflés. Nos quatre artistes y vont à fond. Il n’y a aucun tabou. C’est osé mais jamais choquant, cru mais jamais vulgaire, chaud mais jamais hard. C’est la vie après tout. Et un pareil thème ne peut se focaliser que sur ce qui se passe en-dessous de la ceinture. Et pourtant, cela n’exclut pas les sentiments. Cette fameuse première fois est psychologiquement très importante. Rares sont ceux qui déclarent l’avoir oubliée.

Après avoir insisté une fois de plus sur l’étonnant travail qui a amené à cette véritable performance scénique, il faut justement saluer l’interprétation des quatre comédiens. Ils sont tous épatants, habiles dans tous les registres, précis dans le moindre de leurs jeux. Très bon choix. Mais je ne peux néanmoins m’empêcher de mettre en avant la présence comique de la blonde Belen Lorenzo. C’est un vrai clown, elle est irrésistible.
En allant voir cette pièce, je ne m’attendais à rien de précis. En quelques minutes, j’étais intéressé, puis conquis, pour sortir totalement emballé. C’est une pièce anticrise par excellence et, avec les péripéties du « mariage pour tous », elle est on ne peut plus actuelle. On y rit beaucoup.

Et ça nous rappelle inévitablement un souvenir très personnel, très intime, qu’il ait été bon, ou moins bon…

vendredi 1 février 2013

Hier est un autre jour !


Bouffes Parisiens
4, rue Monsigny
75002 Paris
Tel : 01 42 96 92 42
Métro : 4 Septembre / Pyramides / Opéra

Une pièce de Sylvain Meyniac et Jean-François Cros
Mise en scène par Eric Civanyan
Décors d’Edouard Laug
Costumes de Martine Bourgeon
Avec Daniel Russo (Pierre), Gérard Loussine (Verdier), Axelle Marine (Brigitte Verdier), Jessica Borio (Sophie), Xavier Letourneur (Bernard), Jean-François Cros (Frédéric)

L’histoire : Sur le point de conclure le procès de sa vie, Pierre, un avocat froid et rigide, bourré de principes, va se retrouver obligé de partager une journée avec un homme des plus imprévisibles. Une rencontre improbable qui va bouleverser la vie de l’un comme de l’autre. Une journée de dingues où rien n’est prévu, rien n’est attendu, où tout est possible… et où tout arrive !

Mon avis : Troublant ce phénomène des séries… En deux jours, avec Un homme trop facile ? puis avec Hier est un autre jour !, j’ai vu deux pièces mettant en scène un ectoplasme ! Mais, heureusement, si le traitement est identique (seul le personnage principal voit et entend le fantôme), ces deux comédies n’ont absolument rien en commun.

A l’issue de Hier est un autre jour !, au bar des Bouffes Parisiens, j’ai aperçu les deux auteurs de la pièce. Je m’attendais à deux mecs bizarres, le chef surmonté d’un entonnoir et surveillés de près par des infirmiers psychiatriques… Et bien non. Ils sont tout à fait normaux, banals. Pourtant, il faut être bien barré et avoir le cerveau structuré d’une drôle de façon pour pondre un tel OTNI (objet théâtral non identifié). En fait, ce sont de gentils déjantés.

En effet, voici une pièce qui appartient à la famille du non-sens comme seuls, habituellement, les Britanniques savent en concocter. Elle repose sur un postulat. On ne le voit pas venir tout de suite. Il est habilement préparé, nous laissant ainsi le temps de faire connaissance avec les principaux protagonistes de l’histoire et de cerner leur profil psychologique.
On découvre tout de suite que Bernard et Frédéric sont deux fieffés escrocs et que Pierre a le profil idéal du pigeon. Bernard, le patron de Pierre, acculé par les dettes, est opportuniste et magouilleur. Frédéric, le gendre de Bernard, est un jeune godelureau désinvolte, coureur et sans scrupules. Quant à Pierre, il est maniaque, méfiant, coincé par une terrible psychorigidité et, surtout, viscéralement honnête.
Mais le surnaturel, via l’irruption d’un revenant, va faire tout exploser et faire de cette journée une dinguerie absolue.

Soudain, après cet exposé liminaire, nous sommes entraînés malgré nous dans un monde parallèle où les mots, les gestes, les situations, devenus incontrôlables, se répètent à l’infini. Passées les cinq premières minutes au cours desquels on se demande ce qui se passe, on pige le truc, on adopte le postulat, et on se laisse embarquer dans une histoire les plus loufoques qu’il m’ait été donné de voir. Après, on n’a plus qu’à se laisser porter et à profiter de ce délicieux délire.

Délire, certes, mais parfaitement maîtrisé. Car la qualité de cette pièce c’est que le non-sens finit par en avoir, du sens. Ça dépasse le cadre de la simple mécanique, c’est carrément de l’horlogerie tant les rouages sont minutieusement ajustés. Ici, le comique de répétition est élevé au rang d’art. Mais ce n’est jamais du copié-collé car il y a, à chaque fois, une toute petite nuance qui nous oblige à la plus grande attention. Il y a même, ectoplasme oblige, d’authentiques tours de magie qui sont tellement réussis, que l’on se laisse avoir à chaque fois. Et qu’on y prend plaisir ! Il suffit d’entendre les éclats de rire qui fusent…

Présent sur scène pendant une heure et demie, Daniel Russo est formidable de finesse et de drôlerie. Il faut un sacré métier et un énorme contrôle de soi pour réussir à rendre crédible une situation aussi divagante. Il dépense une telle énergie qu’il doit finir complètement vidé à l’issue de chaque représentation. Chaque scène est tellement ciselée que l’on n’a pas le droit à la moindre approximation. Les comédiens sont en permanence sur le fil du rasoir… Emportés (et rassurés) par cette locomotive qu’est Daniel Russo, tous les acteurs sont à l’unisson. Ce ne doit pas être évident de jouer des situations aussi farfelues avec le plus grand sérieux et, surtout, d’en retenir le texte et la gestuelle exigés pour que le comique fonctionne. On assiste réellement à un grand numéro d’acteurs.

Que c’est bon la folie douce quand elle est aussi jubilatoire !