samedi 21 juin 2014

Nicola Frassanito


Ce métier a ceci de gratifiant qu’il permet de faire des rencontres, beaucoup de rencontres. Et, parfois, celles-ci prennent un caractère exceptionnel.
Par l’entremise d’un ami attaché de presse, François Deblaye, j’ai ainsi été amené à faire la connaissance d’un personnage hors du commun, Nicola Frassanito. Aujourd’hui âgé de 59 ans, cet homme a accompli une trajectoire incroyable qui fascine et force le respect. Moi qui me passionne pour les aventures humaines, avec lui, j’ai été gâté au-delà de toute mesure. Mais, avant de résumer son parcours, je tiens d’abord à préciser que j’ai rencontré un homme authentique, simple et naturellement généreux. A ce niveau, c’est rarissime.

Avec lui, la formule « parti de rien », n’est pas galvaudée. Ses parents, émigrés du sud de l’Italie, son venus s’installer dans les Alpes de Haute-Provence. Le père est maçon. Dès son plus jeune âge, Nicola Frassanito, aîné d’une fratrie de cinq garçons, a la foi chevillée au corps. C’est tout naturellement qu’il entre au Petit séminaire avec pour unique ambition devenir Pape ! Et rien d’autre. Mais le baiser d’une fille allait étouffer dans l’œuf cette noble vocation. C’était trop doux, trop intense ! Une telle révélation rendait incompatible le vœu de chasteté…
Il quitte alors le Petit séminaire pour le collège. En seconde, il choisit l’option… sténo-dactylo (!) et se retrouve seul garçon au milieu de trente filles. En parallèle, il est amené très tôt à épauler son père dans ses travaux. Bac en poche, il n’hésite pas une seconde : il sera maçon comme papa. Mais comme, déjà, il ne fait rien comme tout le monde, il crée sa propre société avec son père et un de ses frères. Au début, les affaires sont florissantes. Avec ses dix employés, la boîte gagne de l’argent. Jusqu’à ce que survienne la crise immobilières. Des projets trop ambitieux et des investissements dispendieux mènent droit au dépôt de bilan. Le gérant qu’il est assume ses responsabilités. Il prend toutes les dettes à sa charge. Il mettra cinq ans pour les éponger jusqu’au dernier centime.


Fini le bâtiment. Nicola doit faire vivre sa petite famille car il s’est marié et il a une petite fille, Olivia. Mais, pour compliquer encore plus les choses, il est tombé éperdument amoureux de Véronique… Il répond à une petite annonce et se retrouve engagé comme commercial par une société marseillaise de courtage. Il s’occupe de contrats d’épargne retraite. Mais lui, il ne s’épargne pas. Pendant trois années consécutives, il est élu Meilleur commercial. Commercial, c’est sa seconde nature. L’homme est convivial, persuasif et, ce qui n’est pas courant dans ce métier, il est honnête et sincère avec ses clients… Professionnellement, il commence à redresser la barre, sentimentalement, il est à la croisée des chemins. Il va se séparer de son épouse pour vivre avec Véronique… Il quitte aussi sa société de courtage et le voici garçon de café à Manosque. Bluffé par son sens du contact et son efficacité, son employeur lui conseille de tenter l’aventure avec son frère qui est en train de monter une société de compléments alimentaires.

Voici de nouveau Nicola commercial. Mais pour être entièrement libre (un mot vital dans sa conception de gérer son existence), il ne veut être rémunéré qu’à la commission. Il court les routes de France, parcourt dix mille kilomètres par mois, multiplie les rencontres et se construit un carnet d’adresses très conséquent. Sous son impulsion, le chiffre d’affaires de la société est multiplié par trente. Cette collaboration va durer une quinzaine d’années. Quinze années immensément formatrices. Nicola n’a plus rien à prouver et, surtout, à SE prouver. Le temps est venu de voler de ses propres ailes. Le milieu de compléments alimentaires lui plaisait, il en connaissait tous les rouages. La suite logique, évidente, était donc de créer une société bien à lui. En avril 2004, naît PhytoQuant. Le siège de la société se trouve à Monaco, où il réside déjà. Il reprend son bâton de pèlerin pour visiter les thérapeutes pendant que Véronique s’occupe de la logistique.
Le respect de la clientèle avec des produits fiables, validés par des sommités du monde médical et de la pharmacologie, sans cesse perfectionnés, enrichis, voire transformés, et le charisme hors norme de son patron font connaître à PhytoQuant un succès planétaire. La force de Nicola est aussi d’avoir su s’entourer. Il se sent en sécurité et en totale confiance avec sa précieuse garde rapprochée formée de Véronique, de sa fille Olivia et de son beau-fils Julien.
La boîte tourne remarquablement mais Nicola ne s’endort pas sur ses lauriers. Il évolue sans cesse, recherche des innovations. Il a donné une petite sœur à PhytoQuant, Solavie, une gamme de produits cosmétiques 100% naturels.


Or, Nicola Frassanito n’est pas qu’un inlassable travailleur. Il est également – c’est dans ses gènes – un artiste-né. Comme la plupart des émigrés italiens il a la chanson chevillée à l’âme. Frank Sinatra, Salvatore Adamo, Frédéric François, Roberto Alagna en sont les plus célèbres exemples. Nicola a vu les maçons chanter à tue-tête sur les chantiers ou les échafaudages, il était tout naturel qu’il en fît autant. Il est né avec deux bosses : celle du commerce et celle de la chanson. Il chante tout le temps et n’importe où. Il a même réussi à associer le métier et sa passion à l’occasion d’une conférence donné devant cinq cents professionnels en la clôturant par un tour de chant. Du jamais vu dans le monde hypra-sérieux des thérapeutes. Ce happening a eu lieu le 25 septembre 2011 au Trianon. Une vidéo et un CD en sont issus. Un CD de 13 chansons, intitulé Et pourquoi pas ?, un titre qui résume la philosophie de vie de Nicola.

Nicola Frassanito est réellement un personnage hors du commun. C’est un humaniste qui s’est construit sur des critères intangibles : la sincérité, la générosité, le sens et le respect du travail, l’intuition, le perfectionnisme avec, en permanence à l’esprit, un profond désir de liberté. Il admet qu’il faut parfois compter aussi sur la chance, mais qu’elle ne suffit pas si on n’a pas l’aptitude à l’exploiter et, enfin, il croit au rêve ; aux rêves…
Mais à l’écouter, ce dont il est visiblement le plus fier, ce sont ses 28 ans d’amour avec Véronique, à la fois femme, confidente, complice et associée.
Nicola Frassanito est un homme de cœur, un exemple, un modèle. Quelqu’un de très rare.




lundi 16 juin 2014

Baptiste Giabiconi "Un Homme libre"

Be 1st / Smart / Sony Music
(Sortie le 16 juin)


Il y a longtemps qu’un jeune chanteur n’avait réuni autant d’atouts. Baptiste Giabiconi a décidément tout pour lui. Non seulement il est beau, très beau même, mais en plus il chante vraiment bien le bougre. Il y a là de quoi donner à rêver aux gamines, aux jeunes filles et à leurs mamans. Un beau mec qui chante bien !...

On pouvait subodorer de sa part un album un peu superficiel composé de chansonnettes appartenant plus à la confection qu’à la haute couture, or Un Homme libre s’avère être tout à fait honorable. Ce n’est certes pas un album engagé, mais les textes et les sujets traités ne sont pas mièvres. On sent de la part de Baptiste un réel investissement. Il a voulu que cet opus soit le fidèle reflet de ses idées. Le fait qu’il ait écrit ou coécrit plus de la moitié des textes entraîne automatiquement une profonde sincérité dans ce qu’il chante. Autre chose : le fait qu’il cite Renaud parmi ses influences prouve que Baptiste Giabiconi n’a pas envie de faire dans la bluette.


Baptiste possède donc un joli brin de voix, avec un grain intéressant. C’est un bon interprète, il sait faire passer ses sentiments et ses intentions. Sans doute par recherche de l’efficacité, il a opté pour des chansons plutôt courtes, ce qui est rare (ça va de 2,31 mn à 3,35 mn) et il s’est appliqué à retenir des mélodies dont les refrains entrent bien dans la tête.  Les orchestrations et les arrangements sont bien élaborés. C’est vraiment du travail soigné.

Je n’ai pas tout aimé dans cet album (Embrasse-moi, Je t’adore…), mais il y a sept chansons que j’ai trouvées plutôt à mon goût. Les voici, dans mon ordre préférentiel :

1/ La fille d’hiver
Une très douce mélopée, réellement bien interprétée, dans le souffle. C’est plein d’émotion, sans pathos. Très agréable avec son discret tapis de cordes.

2/ Un Homme libre
Le texte, signé Lionel Florence, est fort bien écrit. J’aime beaucoup cette véhémence mise dans le ton. C’est une sorte de profession de foi déclarée sous une forme qui frise le rap. Baptiste revendique l’image qu’il veut donner de lui. La voix est très devant, énergique. Et cette chanson contient des petits gimmicks musicaux assez sympathiques.

3/ C’est ta route
Texte intelligent sur la transmission qui n’est pas sans rappeler le fameux « Tu seras un homme mon fils » de Rudyard Kipling. La mélodie est efficace.


4/ Petit ange
Chanson pleine de sensibilité sur la perte et l’absence d’un être cher. Là aussi, Baptiste évite l’écueil de la sensiblerie en nimbant la douleur de retenue. Belle guitare acoustique, jolies cordes, c’est vraiment réussi.

5/ Demain
Jolie ritournelle pour une chanson positive et entraînante. Belle idée dans la construction musicale que ces petites parenthèses fredonnées en valse lente. Quant au thème, fédérateur, il devrait avoir un bel impact sur scène.

6/ Je t’emmène avec moi
Le refrain est redoutable d’efficacité. Le jeu avec les chœurs et l’idée de doubler la voix sur certains passages est très agréable à attendre. C’est vraiment une jolie chanson d’amour toute simple.

7/ Elle est celle
J’aime beaucoup cette mélodie tour à tour « sucrée » et « salée », l’arrangement frise la musique bastringue sans jamais y basculer. Reste une chanson sautillante et primesautière qui clôture fort plaisamment cet album.





samedi 14 juin 2014

Le Point Virgule fait l'Olympia et Bobino

Le Point Virgule a fait l’Olympia et Bobino


Les 12, 13 et 14 juin, a eu lieu la septième édition de ce rendez-vous désormais incontournable pour les amateurs d’humour, de bon humour. De même qu’il existe un Printemps de la Chanson, cette manifestation pourrait être sous-titré « le Printemps de l’Humour ».
Dix jeunes artistes passés par ce creuset de talents que sont le Point Virgule et, plus récemment, le Grand Point Virgule, sont venus présenter un sketch dans ces salles prestigieuses que sont l’Olympia et Bobino. Le fait d’avoir été sélectionné pour faire partie de ce programme est un signe fort de reconnaissance.


Hier soir, je me trouvais donc à Bobino et je peux affirmer que, décidément, l’humour se porte vraiment bien en France. Les humoristes à l’affiche proposaient une palette de jeu très variée et, surtout, d’un excellent niveau, tant dans l’expression que dans l’écriture.
Intronisé maître de cérémonie, Ben, a fait une fois de plus étalage de son insolente maîtrise de l’absurde. Très élégant dans son smoking, il nous a encore sorti des phrases alambiquées et des digressions saugrenues qui n’appartiennent qu’à lui (j’ai adoré son détournement : « Pas de break, pas de chocolek !...). Son échange autour de l’histoire de Bobino avec Christine Berrou était absolument désopilant. Ben a pris une belle envergure dans le panorama de l’humour français. Je pense qu’il n’a pas fini de nous surprendre.


Dans ce programme, parmi de jeunes pousses, figuraient néanmoins quelques artistes déjà confirmés. On ne présente plus Vérino. Il fait un carton tout-à-fait justifié partout où il se produit. C’est une valeur sûre.
Il y avait Tano aussi, dont j’avais déjà vu deux spectacles. Au fur et à mesure de ses prestations, il s’affirme de plus en plus. Il prend de plus en plus d’aisance, il va de plus en plus loin. Son humour, toujours bien écrit, est corrosif, osé, anticonformiste et il joue de mieux en mieux. A suivre, et de près…


Les autres artistes, je les connaissais un peu ou pas du tout. Les voici par ordre d’entrée en scène :
Fary m’a vraiment bluffé. En plus de son accoutrement improbable mais visiblement très étudié, il sait tout faire avec son corps. Il a une présence incontestable. Avec un air de ne pas y toucher, passant son temps à s’excuse avec son leitmotiv à l’adresse du public « Soyez pas méchants », il énonce et dénonce des vérités qui ne sont pas toujours bonnes à dire. Son humour est très fin, subtil. Avec un ton distancié, il aborde des sujets aussi épineux que le communautarisme, le racisme et… les filles. C’est très gonflé, et ça fait mouche à tous les coups. Une authentique révélation et un potentiel énorme. C’est un personnage.
Marc-Antoine Le Bret a su lui aussi m’amuser et, surtout, me surprendre. Des imitateurs, j’en ai croisés énormément et même accompagnés certains. Marc-Antoine m’a intéressé par sa façon intelligente d’amener ses imitations. Du jamais vu. Rayons voix, il nous a cloné des gens dont on n’a pas beaucoup l’habitude : Laurent Deutsch, André Manoukian, Benjamin Castaldi, Denis Brognart, les frères Bogdanov… Il est très facile, il a du charisme et ses textes sont remarquablement ciselés.



Alors lui, c’est mon gros coup de cœur ! Antoine Schoumsky va très rapidement faire partie de nos têtes d’affiche. Je l’avais déjà repéré dans On n’ demande qu’à en rire sur France 2. Chacune de ses prestations a été marquée du sceau de l’originalité. Il sait à ravir interpréter les personnages inquiétants, les psychopathes, les débiles plus ou moins légers. Son visage est très expressif et il possède la gestuelle d’un véritable acrobate. Artiste complet, il s’inscrit dans un registre bien à lui qui repose sur un humour très, très noir, voire féroce. J’ai hâte de découvrir son one man show dans son intégralité.

Bouchra aussi est étonnante par l’éventail de ses capacités. Non contente de savoir nous faire rire, elle danse à merveille, elle possède tout un arsenal de mimiques imparables et un sourire dévastateur. Très féminine, elle raconte son enfance, égratigne ses camarades d’école, revendique ses origines algériennes, s’en amuse et, avec beaucoup de pertinence et d’impertinence, ne tombe jamais dans le communautarisme. Une très belle présence.
Céline Lelièvre est pour moi un cas à part. Les fées se sont visiblement attardées sur son berceau pour la fignoler. Très jolie, agréable à regarder, bonne tchatcheuse, c’est une remarquable danseuse de hip-hop. Elle se livre à un cours collectif avec leçon de gestes et apprentissage du jargon hip-hopien. C’est convivial, interactif, mais ça trouve difficilement sa raison d’être dans un spectacle réservé à l’humour. Elle a néanmoins le mérite de se livrer avec une belle générosité.
Alex Barbe, je l’avais déjà entraperçu. Avec une espèce de nonchalance et une allure de premier de la classe, il pratique un humour corrosif, frontal, délicieusement dérangeant. On sent qu’il des choses à dire et la façon de les dire. Un garçon très prometteur.
Farid Chamekh aussi ne m’était pas totalement inconnu. Il fait également partie de ces artistes complets qui savent tout faire. Souriant, sympathique, très à l’aise avec son corps, il possède une grosse présence. Il a visiblement un métier déjà affirmé. Il donne lui aussi envie d’en voir plus.


Enfin, Christine Berrou est une de mes belles surprises de cette soirée. Déjà, au cours de ses saynètes farfelues avec Ben, je l’avais trouvée vraiment drôle. Elle a une façon quasi innocente de balancer vannes et vacheries. Elle possède surtout une très belle écriture. Lumineuse, fine, pratiquant à ravir l’autodérision, elle est particulièrement efficace dans le second degré. Avec une telle plume, une présence aussi charismatique et sa voix de petite fille elle devrait aller très loin.


Voilà. Elle était pas chouette ma soirée ?...

lundi 9 juin 2014

Mistinguett Reine des Années folles

Big Band Productions / Capitol Music / Universal Music


 En toute honnêteté, j’ai vraiment été enchanté par la qualité des chansons originales qui figurent sur le CD Mistinguett Reines des Années folles. Ces chansons feront évidemment partie de la comédie musicale qui sera présentée au Casino de Paris à partir du 18 septembre.

Si je n’ai pas été surpris par le niveau des textes fignolés par Vincent Baguian, j’ai été en revanche bluffé par les rythmes et le son des mélodies concoctées par Jean-Pierre Pilot et William Rousseau. Les huit titres qu’ils ont réalisés sont d’une excellente facture et correspondent parfaitement à l’esprit de ces « Années folles ». Sincèrement, il fallait le faire !
Lorsque j’ai mis le CD sur la platine, je ne connaissais que les quelques chansons entendues à la radio ou découvertes lors du show case du 3 juin. Mais lorsqu’on écoute l’intégralité de l’album, on ne peut que tomber sous le charme et ressentir une irrépressible envie de  frétiller des gambettes.
Au moins, pour ce qui est de la bande son, le spectacle est déjà assuré.

Ma chanson préférée est Oser les larmes. La mélodie, très jazzy, vous pénètre dans le cortex, l’envahit, et s’y installe sans aucune gêne. Et puis il faut mettre en exergue la prestation de Stéphane Chausse à la clarinette.


Ensuite, j’ai adoré Con-vain-cu. Le seul (petit) reproche que je lui fais, c’est l’abus de féminines en fin phrase : devoir prononcer les « e » muets écorche un tantinet la perception… Mais la chanson est une réelle réussite. Elle est délicieusement osée et provocante, remarquablement interprétée par Carmen Maria Vega et, là aussi, la présence des cuivres, trompette et saxo, est un vrai plus.
En trois, je place Paradis illico. Sur ce titre qui avance tout le temps, Alain Chamfort est venu apporter sa contribution. C’est une chanson vraiment formatée « comédie musicale », une évidente chanson de scène.
Excellente chanson de scène également, Dingue des Années folles, nous installe dans une ambiance tonique et festive à souhait. Swing, voix distordues, le traitement est très américain.

Mais j’aime presque autant la Valse de la chance, jolie valse lente au climat chargé de mélancolie qui traduit parfaitement l’état d’esprit du personnage. Et puis, au niveau de l’écriture, le Baguian s’est astucieusement ingénié à y glisser des sonorités en « passe » en clin d’œil à la roulette… Après, dans l’ordre préférentiel, viennent Drôle mambo pour son atmosphère, L’Homme infâme et Le seul vrai boss ici-bas pour son ambiance bastringue et la qualité de ses chœurs.

Bien sûr, je ne m’attarde pas sur les trois chansons d’époque, Mon homme, C’est vrai et Je cherche un millionnaire, des standards quasiment centenaires qui font partie du patrimoine et qu’on ne présente plus.

Maintenant, il faudra attendre le 18 septembre pour juger de la qualité du livret et de l’histoire. Mais, ce qui est déjà certain, c’est que les chansons tiendront formidablement leur place.



vendredi 6 juin 2014

Mur

Théâtre de Paris
Salle Réjane
15, rue Blanche
75009 Paris
Tel : 01 42 80 01 81
Métro : Trinité

Une comédie romantique d’Amanda Sthers
Mise en scène par Anne Bourgeois
Scénographie d’Edouard Laug
Lumières de Laurent Béal
Costumes de Mina Ly
Musiques de Jacques Cassard
Avec Nicole Calfan et Rufus

L’histoire : Lui fut colonel. Elle, institutrice. Les deux sont retraités, seuls, beaux et odieux dans leurs égoïsmes, ce qui les fait ressembler à des enfants.
A travers le mur mitoyen de leurs deux appartements, ils se disputent pour défendre leur droit au silence, à la musique, aux odeurs, à la vie… et s’envoient frénétiquement des lettres de protestation qui deviennent bientôt le terrain de jeu d’une haine grandissante.
Jusqu’à ce que la demoiselle rompe l’équilibre de la discorde par une vengeance absurde et néanmoins terrible : profitant d’une absence de son irascible voisin, Elle déplace le mur qui les sépare et lui vole un peu de son espace…

Mon avis : Quelle jolie pièce ! Quel duo ! A la fois un vrai moment de grâce et un grand numéro d’acteurs.
Décidément Amanda Sthers confirme ses grands talents d’auteur moderne. On constate qu’elle les connaît bien ses contemporains. Elle maîtrise parfaitement les psychologies tant féminines que masculines et, surtout, elle possède un sens aigu des dialogues vifs et imagés, ainsi que l’art des formules qui font mouche.


Mur est donc annoncé comme étant « une comédie romantique ». C’est tout à fait vrai. Tous les (bons) ingrédients y figurent. Deux personnages hauts en couleurs avec des caractères bien affirmés se retrouvent à devoir gérer, chacun avec des armes qui lui sont propres, un conflit de voisinage… Tout est plausible, ou presque (je reviendrai un peu plus tard sur ce « presque »).
Le décor est on ne peut plus explicite : côté jardin, la pièce où vit le colonel en retraite ; côté cour, celle où vit l’institutrice à la retraite. Cette mise en scène permet d’aller très vite dans échanges. Car, dès le début, nous assistons à un ping-pong épistolaire dans lequel les échanges sont de plus en plus violents et les balles de plus en plus chargées de poudre…
L’hostilité entre les deux solitaires est de plus en plus palpable, la malignité et la pugnacité de l’une poussant l’autre à ébullition.
Mais, au moins, ça les occupe !


Rufus est remarquable en vieux militaire acariâtre et bougon, rigide et entêté, sûr de son bon droit, un tantinet hâbleur et profondément misogyne. Il nous distille tout un arsenal de mimiques, de gestes et de poses tellement expressifs (mais toujours empreints de subtilité) qu’il déclenche sans cesse les éclats de rire.
Toute en nuances, Nicole Calfan, charmeuse et féminine en diable, campe une vieille demoiselle que la vie n’a pas toujours gâtée mais qui, restée positive, s’impose quelques challenges pour enjoliver son horizon comme réussir à jouer parfaitement La Lettre à Elise au piano… Elle est lumineuse !


L’antagonisme entre ces deux êtres que tout oppose va peu à peu s’édulcorer, s’estomper et ce sont les affres de la solitude qui vont construire une passerelle. D’un affrontement extrême va naître un tout aussi impérieux besoin de l’autre… Rufus et Nicole Calfan vont ainsi basculer de ce qui ressemble au départ à une Guerre des Rose entre voisins en un véritable bain de jouvence qui va les amener à se comporter maladroitement tels des adolescents ressentant leurs premiers émois amoureux. Cette évolution dans les sentiments impose aux comédiens une incroyable palette de jeu. Et ils s’en acquittent avec une justesse et une finesse en tous points remarquables.

Quant au « presque » que j’ai évoqué plus haut, il concerne le postulat quelque peu irrationnel imaginé par Amanda Sthers : permettre à l’institutrice de pouvoir repousser le mur mitoyen pour ainsi diminuer l’espace vital de son irascible voisin tout en augmentant considérablement le sien. Il fallait cette métaphore audacieuse pour relancer la pièce et lui donner grâce à cette licence une autre dimension.

Cette pièce a également pour effet immédiat de nous donner à réfléchir et on sort du Théâtre de Paris en se promettant de prêter plus attention à ses voisin, a fortiori s’ils sont âgés et seuls.
Au lieu de séparer, ce Mur est réunificateur. Et vu, pendant et après, les manifestations d’enthousiasme du public, on prend énormément de plaisir pendant une heure et quart. Les sourires d’Alain Delon, Gérard Darmon ou Philippe Lellouche, présents ce soir-là dans la salle, n’ont fait que le confirmer…
A noter aussi la qualité des séquences musicales, genre de musique jazzy bastringue, de ragtime pour film muet burlesque.

Gilbert « Critikator » Jouin


La Belle Hélène

Théâtre du Gymnase du 2 au 7 septembre 2014
Puis en tournée avant de revenir s’installer à Paris.



L’espoir Belle Hélène

J’ai assisté hier à une présentation de La Belle Hélène, l’opéra-bouffe de Jacques Offenbach, créé en 1864 (il y a donc tout juste 150 ans !), qui sera proposé dans une version très modernisée à la rentrée de septembre au Théâtre du Gymnase avant de partir en tournée à travers la France.

Les cinq tableaux que j’ai vus m’ont littéralement emballé. Pierre-Yves Duchesne, qui en assure la mise en scène, a su à la fois totalement respecter le livret originel et lui donner un sacré coup de jeune. Je pense en effet que tout est réuni pour faire de ce qui fut une des toutes premières comédies musicales un succès intergénérationnel. Voici, dans le désordre, les ingrédients qui me permettent de l’assurer :

1/ La musique d’Offenbach.
La partition de La Belle Hélène comprend quelques tubes qui sont passés à la postérité, ne serait-ce que le fameux « Je suis l’époux de la Reine, poux de la Reine, poux de la Reine… »

2/ Les chorégraphies
Pierre-Yves Duchesne a eu la judicieuse idée d’instiller de la danse urbaine (break dance, hip hop, ragga…) au milieu d’évolutions plus classiques. Ce parti pris apporte une dynamique très actuelle. Aujourd’hui, on ne saurait concevoir un spectacle musical sans faire appel à ce moyen d’expression si prisé du jeune public (et des plus âgés aussi) pour son côté spectaculaire et ses prouesses physiques.

3/ La scénographie
Là aussi, on s’est mis au goût du jour avec l’utilisation de la technique du mapping vidéo en 3D. En projetant des images hautes définition, ce procédé amène une totale liberté et ajoute une grande esthétique à l’aspect visuel de ce spectacle.

4/ L’humour
L’humour, l’ironie et la satire sont des éléments propres à l’opéra-bouffe. Les auteurs du livret de La Belle Hélène, Henri Meilhac et Ludovic Halévy en ont saupoudré les textes des chansons et des dialogues. Pierre-Yves Duchesne y a ajouté une note de burlesque et énormément d’autodérision.


5/ Le casting
Alors là, on ne peut rêver de plus « belle » Hélène que Pauline Bailleul. Elle a tout pour elle : la majesté inhérente à son personnage, le charme, la féminité, la sensualité et, ce qui ne gâche rien, le second degré… Antony Véronèse est un Pâris parfait, un Adonis qui se complaît à jouer au bellâtre avec une gourmandise évidente…Salomé Hadjadj campe une Calchas élégante et pleine de drôlerie… Francisco Gil incarne un Ménélas digne de la comedia dell’arte, frisant le caricatural sans jamais y tomber… Pierre-Yves Duchesne apporte sa prestance et son métier consommé au roi des rois Agamemnon… Et j’ai retrouvé avec grand plaisir Gwendal Marimoutou, dans le rôle d’Oreste ; je l’avais repéré dans la pièce Ados et il avait confirmé ses talents de chanteur dans la dernière édition de The Voice. Un garçon qui ira loin.
Enfin, quelle astucieuse trouvaille que d’avoir confié le rôle de la narratrice à Claude Gensac. La présence de l’épouse de Louis de Funès dans la série des « Gendarme » ne fait que confirmer la volonté de recul et d’humour à cette adaptation.


Pour vérifier tout cela, rendez-vous au Théâtre du Gymnase début septembre. Au Gymnase, il va y avoir du sport, il va y avoir du Sparte…

mercredi 4 juin 2014

Stanislas "Ma solitude"

Polydor / Universal Music

Après avoir écouté les deux premiers titres de Ma solitude, l’album de Stanislas, j’étais littéralement aux anges. Au ciel. Carrément. Quels beaux morceaux !
Ce n’est pas par hasard que j’évoque les anges et le ciel car tant Ma solitude que Là où le ciel rejoint la terre sont empreints d’un climat paradisiaque. Dans la première chanson, au superbe refrain, la voix, éthérée, se mêle et se fond harmonieusement avec les instruments. On a la sensation d’entendre un cantique… Quant à la seconde, c’est un tube ! C’est léger, onirique, plein de poésie. On est en plein rêve.
Tout de suite, mis dans te telles conditions d’extase quasi mystique, je me suis dit que cet album devait s’écouter lumières tamisées, les yeux mi-clos, main dans la main avec l’être aimé, chacun laissant ses propres images vagabonder en fonction des images et des émotions si joliment distillées. Si ce n’est pas du romantisme, ça !


Et puis, peu à peu, la suite m’a fait quitter le nuage sur lequel j’étais juché. Avec les deux premiers titres la barre était mise vraiment très haut. On comprend qu’il soit difficile, voire impossible de maintenir un tel niveau.
Bien sûr, Ma solitude est un bon album, très respectable. Il y a eu du travail. Mais il est quelque part victime d’un parti pris d’homogénéité qui le rend par trop redondant (des titres comme Tu aimais tout ou Septembre, par exemple) et même monotone (Métropoles immobiles).


On sent dans cet album combien Stanislas a de respect pour la chanson et plus encore pour la musique qui l’habille. Son piano l’emporte dans une espèce de lévitation qui le place à mi-chemin entre la musique symphonique et la variété mais, à mon goût, plus près du ciel que de la terre. Au moins, c’est là son image de marque.
Mais que les deux premières chansons sont belles !

Voici donc mon hit-parade personnel ; forcément subjectif :

1/ Là où le ciel rejoint la terre

2/ Ma solitude

3/ Super Vintage !
Délicieusement pop, beatlesisant, truffé de références et de name dropping. Fait un peu penser au Rock Collection de Voulzy.

4/ Ceux que j’aimais
C’est une prière, une chanson pétrie d’humanité, judicieusement traitée en valse lente.

5/ Les Nuits urbaines
Belle omniprésence du piano. Une jolie ritournelle rythmée comme le ressac.

6/ Shanghai Night
J’ai beaucoup aimé parce qu’elle m’a rappelé les Sparks.

7/ J’aimerais être une chanson
Confession de foi légère et virevoltante sur le mode boîte à musique. C’est très ambitieux (trop ?)…