mercredi 30 septembre 2015

Un certain Charles Spencer Chaplin

Théâtre Montparnasse
31, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 77 74
Métro : Gaîté / Edgar Quinet

Une pièce écrite et mise en scène par Daniel Colas
Décors de Jean Haas
Costumes de Jean-Daniel Vuillermoz
Lumières de Franck Thévenon
Musique originale de Sylvain Meyniac
Vidéo d’Olivier Bémer
Chorégraphie de Cécile Bon
Avec Maxime d’Aboville (Charles Spencer Chaplin), Béatrice Agenin (Hannah, une secrétaire), Linda Hardy (Oona, …), Benjamin Boyer (Sidney), Xavier Lafitte (Reeves), Adrien Melin (Hoover, Sennett, …), Coralie Audret (Paulette, …), Alexandra Ansidei (Mabel, danseuse, …), Thibault Sauvaige (Le Commandant, Ted, …), Yann Couturier (Jack, …)

Présentation : L’extraordinaire épopée de l’homme sans doute le plus populaire du XXème siècle, Charles Spencer Chaplin. Tour à tour drôle ou grave, une réflexion sur la liberté individuelle, sur l’humanisme et la tolérance, et les paradoxes du génie. « Charlot », un homme libre, un véritable citoyen du monde !

Mon avis : Décidément cette rentrée 2015-2016 nous réserve un sacré lot de très grands moments de théâtre. Un certain Charles Spencer Chaplin en fait hautement partie.
A travers une vingtaine de tableaux, Daniel Colas nous fait revivre la trajectoire unique du plus grand artiste du XXème siècle, Charlie Chaplin. Entre flashbacks et chronologie, il a mis la loupe sur des moments cruciaux de la vie professionnelle et privée de cette méga star planétaire. Nous ne sommes jamais désorientés car la présence d’un écran – cinéma oblige – lui permet d’afficher la date et le lieu de l’action que nous allons suivre.

Photo : J. Stey
Cette succession de scènes nous amène à découvrir à la fois ce qui a fait de Charlot le plus grand créateur comique de tous les temps et l’homme qu’il était en dehors des plateaux. On assiste ainsi à ses débuts dans le cinéma où ses incessantes propositions et sa forte personnalité enchantaient tout autant qu’elles posaient problème. Puis on voit sa notoriété grandir, s’internationaliser, ce qui lui permet d’obtenir rapidement sa liberté par rapport aux grandes firmes. Nous avons même droit, en live s’il vous plaît, au remake d’un slapstik de 1915, Charlot boxeur (un tableau drôle et savoureux)…
Ensuite, à travers le personnage de J. Edgar Hoover, qui synthétise à lui seul tous ses détracteurs, nous réalisons tout ce qu’il a pu subir en matière de rumeurs, d’accusations le plus souvent infondées, de jalousie… Au cours d’un formidable échange avec Paulette Godard, qui a partagé sa vie pendant près de dix ans, on en apprend énormément sur l’homme qu’il était dans l’intimité et sa dualité… En effet, ce génie du gag et de la comédie qui voulait « faire rire tout en donnant à réfléchir », n’était pas si drôle que ça, tant au travail que dans l’intimité. Exigeant, méticuleux, tyrannique, séducteur attiré par les (très) jeunes femmes, Daniel Colas brosse de lui un portrait juste et sans concession.

Photo : J. Stey
Charlie Chaplin étant un de nos contemporains, il était impossible de fictionner quoi que ce soit. Tout ce qui se passe, tout ce qui est dit dans ce spectacle a eu lieu et a été prononcé. C’est quasiment un documentaire sur la vie et l’œuvre de Charlot. Le résultat est une pure merveille.
La mise en scène est astucieuse et particulièrement efficace. On ne va qu’à l’essentiel sans s’encombrer de changements de décors lourds à gérer ou de mobilier superflu. Les costumes sont magnifiques et la musique qui ponctue les intermèdes apporte une valeur ajoutée.

Photo J. Stey
Mais, outre l’histoire captivante qui nous est contée, on est absolument éberlué par la prestation de Maxime d’Aboville dans le rôle titre. Il est au-delà de la performance, il est carrément dans le registre de l’exploit. A sa toute première apparition où il est de profil et sourit, sa ressemblance avec Chaplin est stupéfiante. Et, pendant toute la durée de la pièce, il EST Charlot. Son mimétisme est criant de vérité. Il atteint une telle perfection de jeu qu’il mériterait amplement de décrocher un second Molière.
Autour de lui, ses neuf partenaires ne sont pas mal non plus. D’autant qu’ils tiennent pratiquement tous plusieurs emplois. Adrien Melin est particulièrement épatant dans le double rôle de Mack Sennett et de J. Edgar Hoover. Béatrice Agenin est pleine de charme et d’élégance ; Alexandra Ansidéi est tonique et pétillante à souhait ; et Coralie Audret campe une séduisante Paulette Godard au caractère à la fois enjoué et trempé (pour moi la scène dans laquelle elle règle ses comptes avec Charlie – remarquablement dialogué – est un des moments forts de la pièce)… Et puis, il n’est pas injuste de dire qu’avec le rôle d’Oona, Linda Hardy a gagné ses galons de comédienne.


Gilbert « Critikator » Jouin

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